Bientôt, quand Monsieur Dupont ira aux chiottes, il regardera la cuvette avec attention en se demandant si la NSA ne va pas s'informer sur la consistance et la couleur de son étron ! Sale, direz-vous ! Mais la saleté n'est pas de ce côté-ci. La merde vient d'outre-Atlantique.
Passons sur les premiers épisodes, sur la colère d'Angela Merkel, la stupéfaction des diplomates français, etc. Attachons-nous aux nouvelles fraîches (!) que nous livrent les journaux anglo-saxons, principalement, et que distille, avec un art consommé du suspense, le super héros Edward Snowden.
Ondes radio
Après le programme PRISM, spécialisé dans l’espionnage des conversations téléphoniques dans le monde, révélé par cet ex-agent de la NSA, réfugié actuellement en Russie, on a appris par Le Guardian qu'un autre programme pirate, baptisé "Dishfire", était dédié à l’espionnage des SMS. Près de 200 millions de SMS sont récupérés chaque jour dans le monde pour en extraire des renseignements. Une paille !
On continue ! La NSA peut pénétrer des ordinateurs qui ne sont pas connectés à Internet grâce à un système d'ondes radio, nous a assuré le New York Times, deux jours avant le discours de Barack Obama sur la réforme des programmes de surveillance. Des précisions ? L'Agence aurait implanté dans près de 100.000 ordinateurs dans le monde un logiciel lui permettant de surveiller ces machines, mais aussi de "créer des autoroutes numériques pour le lancement de cyberattaques". Encore ? Les ondes radio seraient transmises "à partir de petits circuits électroniques ou depuis des cartes USB installées secrètement dans les ordinateurs". Par qui ? Ce n'est pas très clair ! Mais vous attendez-vous à quelque chose de clair ?
Comme a pu l'être le discours du président américain ! Une sauce épaisse pour napper les activités de la NSA et rassurer les "chers amis et alliés" de l'Oncle Sam.
Angry Birds et Google Maps
Puis, dimanche dernier, on a appris que l'Agence nationale de sécurité américaine utilisait parfois les informations collectées à des fins économiques. C'est en tout cas ce qu'a affirmé Edward Snowden dans un entretien à la chaîne de télévision allemande ARD. « S'il y a des informations, par exemple sur Siemens, qui soient dans l'intérêt national, mais qui n'ont rien à voir avec la sécurité nationale, eh bien, ils prendront cette information quand même », a-t-il déclaré. Nous voilà donc dans l'espionnage industriel !
Et hier, lundi, Le Guardian (encore lui !) a révélé que la NSA (et son équivalent britannique, les Government Communications Headquarters (GCHQ)), constatant que certaines applications pour téléphone mobile compilaient de nombreuses informations personnelles sur leurs utilisateurs, s'est mis en tête, ou plutôt en ordinateur, de nourrir gratos ses bases de données. Plus spécialement visées : tout ce qui vient du jeu Angry Birds et de l'application de cartographie Google Maps.
À quand les prochaines révélations ? À quand la saison 4 ou 5 de la série ? On est impatient de savoir comment Monsieur Dupont verra sa liberté ensevelie sous les métadonnées américaines.
Patrick Béguier est journaliste politique et écrivain
Michel Gourd
29/01/2014 01:14
Snowden est-il finalement un espion russe ordinaire ?
Il y a quelque chose d’infiniment dérangeant dans les dernières révélations Edward Snowden. Ce n’est pas tant ce qu’il a dit que quand il l’a fait. Révéler des cas d’espionnage industriel américains le jour même qu’est révélé que la Russie pourrait aussi faire de l’espionnage industriel pendant les olympiques à Sotchi est pour le moins suspect. L’ancien consultant de la CIA que l’on voyait comme un homme avec un sens civique développé serait-il finalement un agent double tout ce qu’il y a d’ordinaire ?
Comment expliquer le fait qu’il ait attendu que son pays d’adoption soit accusé d’espionnage industriel pour dénoncer à son tour les États-Unis et les Britanniques de ce même genre d’action ? Il aurait pu le faire depuis des mois, pourquoi avoir attendu ce moment précis ?
L’un n’excuse d’ailleurs pas l’autre. Le fait que des pays de l’OTAN aient utilisé des applications mobiles d’espionnage n’excuse en rien le fait que la Russie puisse siphonner sans permission toute donnée sur tout appareil électronique en la possession des visiteurs aux Jeux Olympiques. S’il a d’autres révélations de ce type à faire, Snowden devrait les dires tout de suite. Attendre que la Russie soit prise la main dans le sac pour dire que les États-Unis font pire n’est pas une attitude qui colle à l’image que l’homme voulait se donner.