Aux Etats-Unis comme en France ou ailleurs, les drapeaux sont en berne : Nelson Mandela est mort. Peut-être le dernier "grand", de la trempe de ceux qui ont fait le monde moderne.
Par Antoine Laray
Ce n’est pas le moindre des paradoxes d’apprendre le décès du Prix Nobel de la paix le jour où l’ONU donne son feu vert à la France pour intervenir militairement en Centrafrique. D’un côté un pays, l’Afrique du Sud, qui a réussi son passage à la démocratie et qui est devenu le seul pays émergent de l’Afrique sub-saharienne. De l’autre, la Centrafrique qui à l’image de nombre pays d’Afrique noire vit sous la terreur de luttes tribales avec son cortège de massacres, de pillages, de viols, bref l’image même de la bêtise humaine.
Du combat de Nelson Mandela, s’il fallait en retenir une chose, ce serait d’avoir permis, après la première élection multiraciale en 1994, la transition pacifique du régime de l’apartheid à un régime politique noir.
Comment ne pas retenir de son premier gouvernement qu’il s'était donné comme objectif de parvenir à la réconciliation entre les victimes et les auteurs d'exactions politiques en introduisant une Commission Vérité et Réconciliation. Il a mis les droits de l'Homme comme fondement de la politique étrangère. Parmi les autres priorités, notons quand même la mise en place une politique économique axée sur le marché pour favoriser la croissance et la redistribution.
Les meilleures larmes
Tous les problèmes ne sont pas réglés. Loin s'en faut. Certes, les blancs n’ont pas été chassés, mais ils doivent payer la note du régime qui fut autrefois le leur. En particulier, la « discrimination positive » tend à les éloigner de postes à responsabilité. A l’inverse, le pays a dû faire face à une pénurie de cadres, du fait même du régime précèdent. On notera que les pays occidentaux, les mêmes qui pleurent aujourd’hui Nelson Mandela ne se sont pas précipités pour aider la nouvelle démocratie à se développer. Nous dirons que les meilleures larmes sont toujours les dernières. Une autre réalité s’impose aussi, plus de la moitié des Sud-Africains continuent de vivre sous le seuil de pauvreté. «L’essentiel des recettes fiscales tirées des mines disparaissent dans le trou noir du budget national et finissent par financer de grandes propriétés rurales pour les présidents», accuse Mamphela Ramphele, une ancienne directrice de la Banque mondiale, citée par le journal Le Monde. Selon elle, le fossé entre les 8 millions de riches noirs et les 20 à 25 millions de pauvres n’a fait que s’élargir au cours des dernières années. Opération danger pour l’Afrique du Sud !