Paris (75) Société

Agression contre la communauté chinoise : le ras-le-bol d'une ethnie qui souffre

Publié le  Par Florie Valsot

image article

David Monniaux

Dimanche 19 juin, des milliers de chinois et de français d’origine chinoise ont manifesté : ils protestent contre les agressions dont ils sont fréquemment victimes.

©David Monniaux

La manifestation

Le défilé s’est étendu de République jusqu’à Nation, itinéraire tout de même meilleur qu’entre Belleville et Colonel-Fabien pour la manifestation de l’année dernière. Selon la police, les manifestants se comptaient au nombre de 3 000 et selon les organisateurs, il y avait environ 30 000 participants.

« L’insécurité » était le thème, du moins la cause, pour laquelle la communauté chinoise déambulait dans les rues de Paris. Suite à une violente agression qu’a subie Jiamming, le jeune homme de 30 ans est placé sous respiration artificielle à l’hôpital. Roué de coups, il est toujours dans le coma depuis plus de trois semaines. Son frère Jan, brandissant lors de la manifestation la photo-poster du jeune homme sur son lit d’hôpital, a touché plusieurs milliers de personnes qui s’étaient rassemblées pour défiler à ses côtés.

 

« Stop à la violence ! », « Liberté, Egalité, Fraternité, mais aussi Sé-cu-ri-té !!! », tels étaient les slogans qui se répétaient  ce jour là. La communauté chinoise est révoltée par la façon dont on les traite en général. Un trop plein, un ras-le-bol, un besoin d’exprimer dans la rue leur désarroi face à la violence dont ils sont victimes. Dimanche 19 juin, ils ont fait face aux menaces et aux agressions auxquelles ils sont confrontés.

 

L’agression de Jamming

Dans la nuit du 30 au 31 mai, le jeune homme qui travaillait dans un restaurant (à Belleville) s’est fait rouer de coups à la sortie parce qu’il avait tenté de prendre en photo ou de filmer des voleurs qui venaient de s’emparer du sac à main d’une cliente (invitée à un mariage).

Les médecins sont restés vague sur son état, ils ne savent pas eux-mêmes quand il se réveillera.

 

Une extrême violence au quotidien

Un membre de l’association des commerçants de Belleville, agent commercial, témoigne : « dans notre quartier, les vols à l’arraché, dans les voitures, à la sortie des magasins, c’est tous les jours. Si les délinquants s’en prennent aux chinois, c’est parce qu’ils font leur business en espèces, sans carte bleue ».

Selon Jean-Pierre Buisson, un manifestant marié à une chinoise, les asiatiques seraient plus visés lors d’agressions car « il y en a beaucoup qui n'ont pas de papiers et une certaine catégorie de la population française les agresse sachant qu'ils n'iront pas porter plainte à la police ».

 

Depuis une dizaine d’années, les chinois de la région de Wenzhou (ville au Sud de Shangai) ont racheté la plupart des commerces du bas de Belleville, où la communauté maghrébine vivait depuis les années 60. Le directeur de la communication de la préfecture de police reconnaît le grand nombre d’agressions envers la communauté asiatique, selon lui, elles « ne sont pas liées à des problèmes raciaux, mais au fait que beaucoup de Chinois ont l'habitude de circuler en transportant sur eux de grosses sommes en liquide. Il y a les recettes des commerçants, les enveloppes rouges des mariages ou l'argent du jeu, les Chinois étant assez joueurs. »

 

C’est pourquoi la communauté chinoise tient à préciser qu’ « il n’y a rien de politique », selon Olivier Wang, avocat et porte-parole lors de la manifestation, « nous sommes là pour exprimer notre ras-le-bol et rappeler que sécurité est la première des libertés (…) depuis un an rien n’a changé. Il y a plus de policiers visibles mais toujours autant d'insécurité. La violence est même montée d'un cran. Avant on te volait ton portable ou ton argent. Aujourd'hui en plus, on te tabasse. Quand je me promène la nuit à Belleville, je suis toujours obligé de regarder dans tous les sens pour être sûr qu'il ne va rien m'arriver ».

 

 

Les chiffres montrent pourtant une baisse de la délinquance

La préfecture de Paris ainsi que la Mairie du 11e arrondissement assurent que la délinquance est en baisse depuis un an. Selon l’OND (l’Observatoire National de la Délinquance), les agressions sur les personnes auraient diminué de 8,7% en 5 mois sur l’ensemble de la capitale.

 

Cependant, des dizaines de plaintes pour vols et agressions auraient été déposées en à peine quelques mois par les chinois de Belleville. C’est un membre de l’association des commerçants de Belleville, ayant participé à la manifestation, qui s’est procuré les photocopies des plaintes.

 

Il s’agit de « racisme de suspicion »

Selon Richard Béhara, ancien président de l’association Huji, il qualifie de « racisme de suspicion » les raisons pour lesquelles il y aurait plus d’agressions envers la population asiatique. « La police identifie des jeunes en déshérence spécialisés dans l'agression de Chinois, mais elle y consacre peu de temps. Ce sont souvent des mineurs issus eux aussi de l'immigration et qui développent une vision raciste et discriminatoire à l'encontre des Chinois, proche de celle qui stigmatise les juifs. Ils ont de la thune, en liquide, et le risque est diminué dans la mesure où ils ne portent pas plainte. »

 

Le "racisme de suspicion" concerne les personnes stigmatisant les migrants. Eprouvant certainement un sentiment d'injustice, voire de jalousie, ces mêmes personnes s'en prennent d'autant plus aux gens ayant des rentrées d'argent fréquentes (ex : commerces, restaurants...). Du coup, cette non-acceptation d'intégration envers une communauté se traduit par la violence qui peut s'avérer extrême.

 

Cependant, le ras-le-bol des asiatiques provoquent un débordement dans leur parole, ils accusent les jeunes « noirs et arabes » d’être à l’origine de leurs agressions. A leur tour, en s’exprimant dans une langue qui n’est pas (pour la plupart) la leur, ils s’indignent et rejettent la faute sur des communautés que l’on montre souvent du doigt ; ces débordements pourraient être interprétés comme des propos racistes. Olivier Wang explique à ce sujet que cela est « à prendre avec des pincettes ». En effet, « les gens font un constat, ils décrivent un délinquant, mais cela ne veut pas dire qu'il faille stigmatiser l'ensemble d'une communauté et en monter une contre une autre. Nous-mêmes sommes déjà victimes de stigmatisation. »

 

Une image à renvoyer

Quels slogans inscrire sur les banderoles ? Comment prévenir et mobiliser les gens ? Faut-il brandir des drapeaux, lesquels ?...

Ces questions ont fait débat durant 2 semaines lors des 3 réunions de préparation de la manifestation. Olivier Wang s’exprime « Nous sommes des novices (…) il y a certainement des choses que nous n'avons pas faites dans les formes ». Des sites Internet auraient pu être créés où les contacts des organisateurs auraient pu être diffusés, la surprise étant que par ce « manque d’organisation, de communication », l’association à la laquelle appartient Olivier Wang n’a pas participé à la manifestation.

 

Ce dernier a tout de même fourni beaucoup d’efforts afin de veiller au bon déroulement de la manifestation, sans bousculades et sans froisser qui que ce soit, simplement être entendu…  « Ce que l'on ne voulait pas c'est d'être accusés de communautarisme. L'an dernier, l'erreur fut d'avoir des slogans en chinois et des drapeaux chinois. Cette année, nous nous sommes dit que nous étions français, du moins une bonne partie d'entre nous, et qu'il fallait nous approprier les symboles français ».







Réagir

Si vous souhaitez voir votre commentaire apparaître directement sur le site sans attendre la validation du modérateur, veuillez vous identifier ou créer un compte sur le site Paris Dépêches.


Publier le commentaire

Me prevenir des réponses

reactionsvos réactions (1)

avatar

feudouce

30/06/2011 11:25

Il est très regrettable que les associations locales n'aient pas été prévenues. Effectivement, le risque est grand de stigmatiser les communautés qui cohabitent à Belleville.Plutôt que du TOUT REPRESSIF, qui ne règle absolument rien , il serait souhaitable de développer des échanges culturels et amicaux afin de permettre à ces différentes communautés de Mieux se connaître et de mieux s'apprécier.

Association BELLEVILLE galaxie ( organisation d'évènements multi-culturels)

RépondreSignaler un abus

Réagir

Si vous souhaitez voir votre commentaire apparaître directement sur le site sans attendre la validation du modérateur, veuillez vous identifier ou créer un compte sur le site Paris Dépêches.


Publier le commentaire

Me prévenir des réponses

avatar

Anonymous

30/06/2011 11:25

Il est très regrettable que les associations locales n'aient pas été prévenues. Effectivement, le risque est grand de stigmatiser les communautés qui cohabitent à Belleville.Plutôt que du TOUT REPRESSIF, qui ne règle absolument rien , il serait souhaitable de développer des échanges culturels et amicaux afin de permettre à ces différentes communautés de Mieux se connaître et de mieux s'apprécier.

Association BELLEVILLE galaxie ( organisation d'évènements multi-culturels)

RépondreSignaler un abus

Réagir

Si vous souhaitez voir votre commentaire apparaître directement sur le site sans attendre la validation du modérateur, veuillez vous identifier ou créer un compte sur le site Paris Dépêches.


Publier le commentaire

Me prévenir des réponses





Commande de vin

Vêtements bio

retour menuRetour au menu

© 2013 AMLCF - Réalisation : NokéWeb