Présidentielle : la stratégie tous risques de Nicolas Sarkozy.
Publié le Par Jennifer Declémy
Depuis le début de la semaine, par le biais de plusieurs annonces et polémiques, est annoncée la stratégie du candidat Sarkozy. Un seul constat : le président va jouer le tout pour le tout.
Mais quelle mouche a piqué le Président de la République ? Hier ont été annoncés dans toute la presse les futures bases de sa campagne présidentielle, alors qu’il n’est toujours pas officiellement candidat même si ça ne trompe plus personne depuis tout le monde. Mais ces bases même sont incongrues, dérangeantes et fortement politiques.
Incongrues tout d’abord, car elles ne répondent pas aux impératifs économiques et sociaux qui régissent actuellement notre pays. Qui se soucie de l’expulsion des étrangers et de l’indemnisation des chômeurs quand la crise économique et sociale est plus grave que jamais ? Huit millions de français vivent sous le seuil de pauvreté, le chômage est à 10%, des millions de français sont mal logés et la désindustrialisation de la France atteint un niveau sans précédent. De tels problèmes appellent à des réponses, des propositions, des débats qui ne semblent pas figurer dans le futur programme du président-candidat sortant.
Dérangeantes ensuite car elles font appel à des relents populistes qui n’ont pas la place dans cette campagne. D’abord le principe même de référendum fait référence à la république réferendaire que Marine Le Pen appelle de ses vœux. Si sont organisés des votes sur les chômeurs ou les étrangers, pourquoi pas alors sur le mariage gay, le nucléaire, la peine de mort ou l’euthanasie ? Et puis pourquoi pas ensuite sur la proportionnelle, la TVA sociale, le nombre de ministres qu’il doit y avoir ? Et tiens, pourquoi pas même sur le futur traité européen en cours ?
En plus, dans la mesure où le dernier référendum a largement été bafoué par….Nicolas Sarkozy en personne qui s’est hâté d’aller à l’encontre du vote français dès son élection, on peut se douter de la sincérité du candidat UMP.
Politiques enfin car le but évident de cette manœuvre est de cliver profondément la France. Oubliées les allégations de Marine Le Pen faisant sans cesse référence à l’UMPS. Clairement le président veut faire oublier toute idée selon laquelle la droite et la gauche c’est bonnet blanc et blanc bonnet, en divisant la France sur des sujets sociétaux.
D’un côté il y a désormais les offusqués de cette annonce, ceux qui s’insurgent car ils trouvent ces propositions populistes, démagogiques et extrémistes. De l’autre il y a ceux qui sont d’accord avec ces référendums, qui sont prêts à voter oui. Et entre les deux camps, un fossé qui semble de plus en plus infranchissable.
Ce week-end la polémique Claude Guéant avait aggravé le fossé entre sarkozystes et antisarkozystes, attisé les esprits et ranimé des tensions. Aujourd’hui les propositions du président vont dans ce sens, en aggravant encore un peu plus ces querelles. Oublions l’idée que le président de la république, selon la constitution, est supposé rassembler TOUS les français, et non pas ceux de son camp politique. Oublions l’idée aussi qu’il y a des sujets plus graves à traiter. Cette élection présidentielle va diviser les français plus profondément que jamais.
Une dernière question alors, évidente : pourquoi une telle stratégie ? Pourquoi choisir la division et les querelles, alors que déjà jusqu’à présent la campagne se déroulait dans un climat exécrable ? Une seule raison : Nicolas Sarkozy n’a plus rien à perdre, alors il va risquer le tout pour le tout, persuadé que la France est à droite, conservatrice, et préférera être rassurée. La récente révélation de la « peur des riches » face à François Hollande ne peut que le conforter dans cette opinion. Et tant pis pour la dignité de la fonction présidentielle.