Présidentielle : François Bayrou votera pour François Hollande.
Publié le Par Jennifer Declémy
Après presque deux semaines de suspens, le leader centriste a annoncé hier, à la surprise générale, qu'il voterait pour François Hollande dimanche prochain.
C'est "un moment de rupture historique" ont confié nombre de dirigeants du Modem hier, mais au vu de la campagne c'est une décision qui ne surprend guère. Cinq ans après avoir refusé de voter pour Nicolas Sarkozy, François Bayrou franchit le pas et décide de voter pour le Parti Socialiste dimanche prochain, mais ne donne aucune consigne de vote.
"Je ne veux pas voter blanc ce serait de l'indécision" explique le député béarnais qui a notamment opté pour le candidat de la gauche à cause de la tonalité trop droitière de la campagne de Nicolas Sarkozy, qui l'a profondément révulsée. Dès mercredi dernier d'ailleurs il avait mis en garde le président sortant contre cette dérive, mais n'a pas été entendu par l'UMP trop occupé à chasser les six millions de voix du FN, plus intéressantes que les trois millions de voix du centre.
"J'ai examiné depuis deux semaines l'évolution du deuxième tour de l'élection présidentielle" confirme le dirigeant du Modem, qui affirme cependant "ne pas être devenu un homme de gauche". Pas de chéque en blanc pour François Hollande dont l'ancien ministre de l'éducation continue de penser que son programme économique est irréaliste. Reste que "devant cette crise inéluctable, il n'y aura qu'une attitude possible : une unité nationale qui réunira des femmes et des hommes venus d'horizons différents, pour permettre au pays de se ressaisir".
"Si François Hollande en reste à la gauche classique et à son programme, je serai un opposant, dans une opposition vigilante et constructive" prévient d'ailleurs d'ores et déjà le leader centriste, qui prend cependant avec cette décision un énorme risque. Pour un homme de centre-droit, ancien ministre d'Edouard Balladur puis Jacques Chirac, le vote à gauche est une première qui devient la dernière étape d'une évolution politique entamée dès 2007.
La décision d'une partie de ses proches a également pu influer sur le député béarnais. En effet, hormis Jean Arthuis et quelques personnes suivant l'Alliance centriste, une grande partie de l'entourage a déjà appelé à voter François Hollande, et même Philippe Douste-Blazy a franchi une étape en déclarant qu'il ne voterait pas pour Nicolas Sarkozy qu'il avait pourtant soutenu en 2007.
Du côté de l'UMP, la montée des critiques ne s'est pas faite attendre, la droite considérant cette position comme une véritable trahison. Alors que certains ténors étaient désireux de voir François Bayrou devenir le prochain Premier Ministre de la droite, les réactions offensées ont fusé. Nadine Morano a estimé que "François Bayrou se renie, lui et son programme", tandis que pour Pierre Mehaignerie, "c'est une grande déception" et pour Alain Juppé, son ami a été influencé par l'aile gauche du Modem. Jean-François Copé lui "regrette profondément une décision dont il ne comprend absolument pas les motivations sauf à considérer qu'elle serait plus motivée par un dépit personnel que par des vraies raisons de fond".
Du côté de la gauche naturellement on salue cette décision qu'on attendait pas forcément. Ségolène Royal a tenu à saluer "la prise de responsabilité" du centriste "qui a considéré qu'il fallait que les valeurs humaines l'emportent sur les valeurs financières et que cet humanisme centriste n'était plus compatible avec le sarkozysme". François Hollande en personne a rendu hommage à cette décision qui le fait, plus que tout autre geste, apparaitre comme le candidat du rassemblement, mais nie qu'il y ait pu avoir une quelconque négociation entre les deux camps. "C'est un choix d'homme libre, indépendant, qui s'exprime en tant que responsable politique sans engager sa propre formation" a tenu à saluer le candidat socialiste. Et même Jean-Luc Mélenchon a saluté cet "honnête sentiment républicain".