Journalistes tués au Mali : le recueillement et l'enquête
Publié le Par Roxane Bayle
Swiatoslaw Wojtkowiak - flikr
Les corps de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, tous deux journalistes à Radio France Internationale (RFI), ont été rapatriés ce matin par avion. Au Mali, l'enquête débute pour les policiers français envoyés sur place, en collaboration avec les forces maliennes.
L'avion de la compagnie Air France a atterri à 7 heures ce matin à l'aéroport de Paris-Roissy Charles de Gaulle. A son bord, les corps des deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont, 57 ans, et Claude Verlon, 58 ans, journalistes à RFI et assassinés samedi matin à Kidal, au nord-est du Mali.
Les journalistes ont été tué par balles quelques heures après leur enlèvement par un groupe d'homme armés, dans une province qui est revendiquée par la rébellion Touareg. Les hommes à l'origine du kidnapping parlaient couramment cette langue locale,
d'après le principal témoin, Ambéry Ag Rissa, représentant du parti MNLA que les deux Français étaient venus interviewer à son domicile.
François Hollande était présent, tout comme le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius et Aurélie Fillippetti, ministre de la Culture et de la communication, ce matin à l'arrivée des corps. Ils ont montré sympathie et soutien aux proches et aux familles des victimes. Selon l'Elysée, sa seule présence "veut signifier l'hommage de la Nation aux deux journalistes de RFI".La cérémonie s'est déroulé dans la plus grande intimité, sans média.
"Ce sont des gens qui n'ont aucune humanité et aucun respect de la liberté" a déclaré le ministre Laurent Fabius au micro de RFI. "Ils écoutent RFI le matin et assassinent les journalistes de RFI dans l'après-midi".Il a réaffirmé la volonté du gouvernement de retrouver les assassins rapidement et de les "châtier". Aurélie Filippetti en appelle quant à elle, à la défense de la liberté de la presse: "C’est la France qui a été atteinte à travers eux. Ils sont morts en héros de liberté de la presse et de la démocratie. La liberté de la presse est une des pierres angulaires de toute société démocratique. C’est au nom de ses valeurs, de ses combats, qu’ils sont tombés sous les coups d’assassins froids qui les ont exécutés. Il faut que l’information continue. La liberté de la presse ne doit pas céder face au terrorisme, face aux assassins"
Les corps des deux journalistes ont été transféré à l'institut médico-légal de Paris en milieu de matinée, pour y faire l'objet d'une autopsie, dans le cadre d'une enquête ouverte par la justice française. Par ailleurs, sept policiers français, trois fonctionnaires de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), deux membres de la sous-direction anti-terrorriste (Sdat) et deux experts de la police technique et scientifique, ont été dépêchés sur place pour mener l'enquête. Ils interrogent les témoins de l'enlèvement et les suspects arrêtés dans cette affaire. Au total, une quarantaine d'arrestations ont eu lieu près de Kidal par les forces françaises et maliennes.
Plusieurs rumeurs circulent sur cet assassinat dont la thèse avancée par le journal algérien El Watan, celle d'une bavure militaire commise par un hélicoptère de l'armée française, qui aurait tué otages et kidnappeurs en voulant leur barrer la route.
Une minute de silence a été observée à 12h30 par les salariés de RFI au siège de France Médias Monde à Issy-les Moulineaux (Hauts-de-Seine). Des syndicats de la radio internationale ont demandé une commission d'enquête parlementaire, sur le rôle joué par la force Serval, qui a refusé d'accompagner les deux journalistes au nord-est du Mali: " Comment ont-ils pu être kidnappés à Kidal, sans réaction immédiate des forces présentes?"
Suite à cet assassinat, le gouvernement a annoncé le renfort des troupes militaires basées au Mali, avec l'envoi de 150 soldats supplémentaires hier soir à Kidal. Après les élections législatives le nombre de militaires sera réduit de 3000 à 1000 personnes, dont la mission sera cantonnée à la neutralisation des terrorristes: selon le chef du Quai d'Orsay, ils "n'ont pas été neutralisés, en particulier dans la poche de Kidal où la situation reste très difficile" affirmant vouloir agir en liaison avec le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta. Ce dernier a déclaré vouloir tout faire pour retrouver les assassins.
Le patron de l'UMP, Jean-François Copé, a déclaré soutenir le président si il y a une nouvelle opération dans ce pays d'Afrique: "Je demande simplement au président de la République d'être totalement transparent sur les conditions dans lesquelles cette opération doit être menée." a-t-il précisé sur Itélé.