France Société

Poison d'avril

Publié le  Par Un Contributeur

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dr (dessin du Mulot : Jacques Terpant)

J'ai eu beau chercher. Je n'ai vu cette année aucun poisson d'avril.

La tradition de ces petites farces amicales permettant au voisin ou au collègue de bureau de vous accrocher un poisson de papier dans le dos avant de rire (avec vous) du bon tour qu'il vous a joué, serait-elle en train de se perdre définitivement ?
Depuis pas mal de temps déjà, les poissons d'avril s'étaient mués en grosses tanches : certains médias annonçaient le démontage de la Tour Eiffel, traçaient des autoroutes au cœur des villages ou annonçaient que désormais on raserait gratis (ce qui n'empêche pas certains partis politiques de vous le promettre encore !). Mais, cette année, rien !
J'essaye de comprendre, a posteriori, ce qu'il a pu se passer.
Pour accrocher un poisson d'avril sur un dos normal - je veux dire, pas bossu -, il faut s'approcher à moins d'un mètre, ce qu'interdit la nouvelle règle de la "distanciation sociale". À moins d'avoir des membres d'atèle (Non, non, surtout pas, nous avertit le corps médical, persuadé que les singes peuvent transmettre toute sortes de virus !).
Imaginons le problème résolu. Il faut quand même découper le poisson dans une feuille de papier d'un bon grammage (s'il est trop fin, le poisson risque de s'envoler et un poisson d'avril ne peut pas, par définition, être un poisson volant, car alors il n'y aurait plus de farce !). Pour ce faire, il faut des ciseaux ! Mais qui a saisi cet outil tranchant avant vous ? Qui vous dit que l'infâme virus ne s'est pas déposé sur son acier pour vous attraper les doigts !
Passons cette nouvelle frayeur ! Il faut colorier le poisson maintenant, lui faire au moins des yeux et dessiner une queue. Ah ! la boîte de crayons de la cadette !… Mais, à cause du confinement, ça fait deux semaines qu'elle la tripote, l'ouvre, la referme, la rouvre, la referme, pour colorier ses albums ! Et si elle était un "porteur asymptomatique" ?
C'est beaucoup de dangers pour une simple plaisanterie. De toute façon, on ne voit plus ses collègues, ni ses amis, ni ses cousins. Alors, accrocher le poisson au dos de qui ?
J'ai compris pourquoi les Français, pris à l'hameçon du coronavirus, ont renoncé à une tradition pratiquement déjà tombée en désuétude.

Le mulot







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