Le gouvernement a 6 mois pour mettre en application le CV anonyme
Publié le Par Antoine Sauvêtre
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Le Conseil d’Etat exhorte le gouvernement de mettre en application les CV anonymes. Un dispositif pour lutter contre les discriminations à l’embauche rendu obligatoire par la loi sur l’égalité des chances qui date de… 2006.
Une loi qui était passée à la trappe. En 2006, le curriculum vitae (CV) était devenu obligatoire dans les entreprises françaises mais depuis, aucun décret d’application n’a été pris par les gouvernements successifs. Mercredi 9 juillet, le Conseil d’Etat a estimé que « le délai imparti » au gouvernement pour mettre en application la loi était « dépassé ». Et la plus haute juridiction de l’ordre administratif de fixer un ultimatum : le premier ministre doit mettre en application le texte de loi d’ici 6 mois.
Saisi par l’association Maison des Potes-Maison de l’égalité, le Modem, Sciences Po et David van der Vlist, qui estime être exposé à des discriminations à l’embauche en raison de son nom, le Conseil d’Etat s’est toutefois refusé à prononcer d’éventuelles sanctions. Le rapporteur public avait, lui, préconisé de faire payer 100 euros par jour de retard au gouvernement.
Une expérimentation non concluante
Le gouvernement n’a pourtant pas oublié ce texte de loi. La ministre de la Jeunesse et de la Ville, Najat Vallaud-Belkacem, en a même discuté avec les partenaires sociaux lors d’une table ronde sur la lutte contre les discriminations durant la conférence sociale en début de semaine. Une nouvelle réunion est même prévue à la rentrée pour avancer sur le sujet. D’autres méthodes de lutte contre les discriminations à l’embauche jugées plus efficaces par la ministre devraient également être proposées par la ministre comme le CV vidéo ou le recrutement par simulation.
Et si le gouvernement envisage d’autres solutions, c’est que l’expérimentation du CV anonymes ne s’est pas révélée très concluante. Au contraire, elle a démontré que le dispositif pouvait se révéler contre-productif. Les chiffres sont même particulièrement décevants. Ils ont révélé qu’un candidat à un emploi issu de l’immigration et/ou résidant en zone urbaine sensible (ZUS) avait 1 chance sur 10 d’être embaucher avec un CV classique et… 1 chance sur 22 avec un CV anonyme. Cela s’expliquerait par une sorte d’indulgence des recruteurs lorsqu’ils remarquent que le candidat est issu de l’immigration ou vit en ZUS. « Ils pardonnent plus des ‘trous’ dans le CV ou des fautes d’orthographe quand ils connaissent les origines sociales », indique l’AFP, qui cite le Centre de recherche en économie et statistiques (Crest).
Reste que la mesure, décidée par le gouvernement de Villepin après les émeutes en banlieue en 2005, est inscrite dans la loi sur l’égalité des chances, votée en 2006. Le décret d’application n’avait jamais été publié. C’est donc au gouvernement, de gauche, de le mettre en œuvre.