Archéologie à Saint-Denis (93) : à la recherche du Croult

L’îlot du cygne dévoile ses secrets peu à peu. Depuis le 15 juillet, des archéologues liés à l’élu en charge du Patrimoine en mairie de Saint-Denis (93), fouillent un terrain jusqu'alors "vague", en centre-ville. Pour une fois, ces professionnels manient la truelle avec calme car, c’est assez rare pour être signalé, ils ont tout leur temps. "D’habitude, on fait des fouilles préventives" explique Jean-François Goret, responsable du chantier de l’îlot du cygne. "Ce sont des chantiers que l’on mène le plus rapidement possible avant que des bâtiments ne soient construits sur l’emplacement". En gros, la fouille préventive est une course contre la montre où le but est de sauver tout ce qui peut l’être avant que les pelleteuses des promoteurs ne commencent leur besogne. Ici, derrière les palissades du cygne, nous sommes dans le cadre de fouilles programmées : les vestiges du passé ne seront pas saccagés et les archéologues ont du temps. Le chantier se termine en octobre, mais il reprendra l’été prochain. Aucun projet immobilier ne viendra déranger le travail déjà effectué malgré la situation rêvée de l’emplacement, le centre-ville. "Ces conditions idéales nous permettent aussi d’ouvrir le site au public, notamment aux scolaires mais aussi aux seniors" souligne Jean-François Goret. Jusqu’au 30 octobre, l’équipe souhaite accueillir des visiteurs tous les jours. Et pour les Journées du Patrimoine les 19 et 20 septembre, l’entrée (gratuite) se fera de 11h à 19h pour tous.

La trace des siècles
Des recherches archéologiques oui, mais pour trouver quoi ? Comme partout, le sol de l’îlot dyonisien est un mille-feuille dont les strates témoignent du passage des siècles. A quelques centimètres, les vestiges datent du XIXème siècle, plus profondément on peut tomber sur des fondations ou des objets datant du XVIème, voire même du XIIIème siècle. "En 869, raconte JF.Goret, on sait qu’un fossé en eau a été creusé ici. Cette rivière artificielle avait été appelée le Croult. L’eau provenait d’un ruisseau naturel, qui existe toujours au nord de Saint-Denis : la vieille mer. Le Croult servait au travail des artisans. Au XIIème, la période prospère coïncide avec le comblement des fossés de protection qui entouraient la zone, avec des centaines d’objets du quotidien de l’époque, d’ordures, de détritus, ce qui est d’ailleurs une aubaine pour nous, archéologues." C’est ce genre de trésors que recherchent l’équipe. Elle compte également mettre au jour le Croult, asséché.

Également sur ce site, quelques jours seulement après le début du chantier en juillet, l’équipe a excavé un bras de rivière où des blanchisseuses travaillaient au XIXè siècle. D’après JF.Goret, des habitants de Saint-Denis s’en souviennent encore puisque ce cours d’eau s’est tarit dans les années 50.
Les bâtiments du lavoir et même un énorme séchoir sont toujours debout au fond du site (on les aperçoit sur la photo ci-contre).

Fouilles de l'îlot du cygne, en centre-ville. Métro Saint-Denis Basilique (ligne 13).

Texte : Sylvain Jedrezak