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Par décision du 15 avril 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'interdiction décidée le 15 mars 2014 de la commercialisation, utilisation et culture du maïs Mon 810.
Le gouvernement avait déjà interdit à deux reprises en 2008 et en 2012 l'OGM Mon810, décision invalidée par le Conseil d'Etat en 2011 et 2013.
Ce dossier en deux parties étudie la problématique des OGM sous son angle juridique à travers les législations européenne et française mais aussi sous un angle éthique et environnemental : nous avons rencontré plusieurs associations qui faisaient partie du Haut Conseil des Biotechnologies mais l'ont quitté pour dissensions de vues avec l'avis dominant en faveur d'une moindre réglementation.
Une problématique juridique
Qu'est-ce qu'un OGM et que sont les nouveaux OGM ?
Il existe de nombreuses définitions mais une définition simple est donnée par la directive européenne 2001/18
Un OGM (organisme génétiquement modifié) est "un organisme, à l'exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle".
On évoque également de « nouveaux OGM » aussi appelés « new plant breeding techniques », ou NPBT) qui permettent de modifier le génome d’une plante sans recourir à l’introduction d’un gène extérieur. Certains considèrent qu'il s'agit d'un progrès important qu'il ne faut pas brider par l'application de la législation relative aux OGM tandis que d'autres y voient des risques identiques à ceux que l'on attribuent aux OGM classiques et considèrent que les nouveaux OGM doivent donc être soumis aux mêmes règles.
La Commission européenne va préciser sa position après avoir reçu les avis des Etats européens.
4 grands domaines d'utilisation
Les OGM sont utilisés dans 4 grands domaines :
en agriculture
en recherche fondamentale
en milieu industriel où on cherche à créer des molécules biologiques ;
en médecine humaine ou vétérinaire en thérapie génique (consiste à traiter une maladie par transfert de matériel génétique) ou pour la production de vaccins ou de molécules médicamenteuses.
La législation européenne
Une législation européenne existe pour les OGM à laquelle les Etats européens doivent se plier.
Trois sortes d'utilisation des OGM
Trois sortes d'utilisations des OGM sont prévues par les textes au terme d'autorisations données pour 10 ans renouvelable à l'entreprise demandeuse.
Les cultures d'OGM à fins expérimentales
Des cultures d'OGM à des fins expérimentales sont possibles après notification à l'Etat dont le territoire est concerné qui l'autorise ou non en fonction d'un bilan des risques pour l'environnement et la santé.
La mise sur le marché d'OGM destinés à des fins autres que l'alimentation humaine ou animale
Une procédure d'autorisation complexe fait intervenir le premier Etat concerné mais également la Commission européenne et les autres Etats européens ; si une autorisation de culture ou de commercialisation est donnée qui sera valable dans tous les Etats européens.
L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) émet un avis qui sert de base à la décision de la Commission européenne. L'EFSA n'a jamais rendu d'avis négatif mais la Commission européenne n'est jamais passé outre l'opposition d'un Etat.
Seuls deux types d'OGM sont actuellement cultivés dans quelques pays d'Union europénne : le maïs MON810 (Monsanto) et, depuis le mois de février 2014, TC1507 (Pioneer).
Sont actuellement commercialisés du maïs, soja, coton, colza, pomme de terre, betterave.
crédit Fabrice Bluzez
Les conséquences de la qualification d'OGM :
En revanche, la réglementation n'impose pas d'étiquetage spécifique pour les denrées alimentaires (lait, charcuterie, plats cuisinés) issues d'animaux d'élevage nourris avec des cultures transgéniques.
La position de la France
Les Etats peuvent décider d'interdire sur leur territoire la commercialisation d'un OGM autorisée au niveau européen mais ils ne disposent pas pour cela d'un pouvoir discrétionnaire absolu ce que rappelle bien la décision du Conseil d'Etat précédemment étudiée du 15 avril 2016.
Dans son arrêt du 15 avril, le Conseil d'Etat rappelle que les conditions d'interdiction sont les suivantes :
l'interdiction ne peut être que provisoire (à titre conservatoire)
En cas d'urgence
« En présence d’une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l’environnement ».
Ces trois conditions sont cumulatives.
Dans le cas d'espèce, le Conseil d'Etat a estimé que la preuve d'un risque important n'était pas rapportée :
« Les avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) avaient admis certains risques de développement d’une résistance chez les insectes ou d’atteinte à certaines espèces de lépidoptères, mais que ces mêmes avis concluaient que ces risques pouvaient être maîtrisés et que les études scientifiques ne permettaient pas d’estimer que le maïs MON 810 était plus risqué pour l’environnement que le maïs conventionnel ».
Le Conseil d'Etat précise également qu'aucun élément nouveau n'est apporté au dossier par rapport aux procédures précédentes ; l'interdiction du Mon810 qui n'était pas justifiée auparavant ne l'est toujours pas.
Demain : les enjeux éthiques et environnementaux, arguments en faveur ou contre les OGM
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