L'écrivain Sylvain Tesson cible d'une pétition

C'était pourtant très joli, cette présentation signée de Sophie Nauleau, qui justifie la parrainage par Sylvain Tesson du Printemps des poètes, du 9 au 25 mars. Une 25e édition, dédiée, cette année, à "La Grâce". Le Printemps des poètes est une opération de promotion du livre, de la poésie, depuis les librairies jusque dans l'enseignement. Sophie Noleau écrit...
 

"Les poètes l’escortent dans toutes ses aventures. Pas un périple qui ne se réfère à eux. Pas un récit qui ne les convoque. Souvent ce baroudeur esquisse même des haïkus sur sa route, voire d’autres « pensées sauvages ». L’écriture et l’effort, voilà qui donne le cap. La merveille et le risque. L’ailleurs et la grâce. Le péril et les mots. « La poésie est le mouvement des choses » écrit-il à propos de Rimbaud. Telle est sa boussole. Vagabond à temps plein, Sylvain Tesson « n’a pas besoin de converser ; il possède ses poèmes et le chant du monde. Il a d’autres rendez-vous avec la beauté des forêts, avec le soupir des marais, avec le vol des insectes et le ressac des mers ». Et, au nom de La Grâce, en cette année bissextile, il a aussi rendez-vous avec le Printemps des Poètes."  

 

 

Une pétition, une de plus

 

Hélas, la saison est aux pétitions contre les têtes qui dépassent et Sylvain Tesson n'y échappe pas. 1.200 personnes ont signé, dans Libération... 

 

"Plus de 1200 poétesses, poètes, éditrices et éditeurs, libraires, actrices et acteurs de la scène culturelle française refusent la nomination de Sylvain Tesson, qu’ils considèrent comme une «icône réactionnaire», comme parrain du Printemps des poètes 2024." 

Pour l'anecdote, certain(e)s ont déjà retiré leur signature... Mais le mal est fait, le débat est lancé, la polémique envahit les plateaux de télévision (pas trop quand même, Tesson est moins connu que Gérard Depardieu ou Alain Delon).

 

Pourquoi brûler Tesson ?
 

 

Pourquoi veut-on brûler Tesson ? Ou l'effacer si l'on veut rester dans la "cancel culture", ce qui revient au même dès lors qu'on mobilise les foules contre un homme seul, pour ses actes  ou ses idées supposés...  Tout commence peut-être avec un livre de François Krug : "Réactions françaises", sous-titré "Enquête sur l'extrême droite littéraire". Le livre accuse Sylvain Tesson, Michel Houellebecq, Yann Moix, d'accointances avec "les fachos". La présentation de l'ouvrage sur Amazon, le dit...

 

"Sait-on que Michel Houellebecq n’a jamais cessé de prendre sous son aile des royalistes de l’Action française puis des blogueurs stars de la « fachosphère » jusqu’aux dirigeants de Valeurs actuelles ? Sait-on que Sylvain Tesson, l’écrivain-voyageur, a fait ses débuts sur Radio Courtoisie, la station d’extrême droite ? Que son premier voyage, un tour du monde à vélo, se fit sous l’égide d’une association d’anciens de l’Algérie française et du FN ? Qu’il entretient des liens étroits avec la Nouvelle Droite ? Sait-on que les liens de Yann Moix avec des antisémites et même des négationnistes ont été plus étroits qu’il ne veut le dire ?"  

 

"Une préface au Camp des Saints..."

 

Parmi les accusations, en voici une majeure : Sylvain Tesson aurait écrit une préface au livre "Le Camp des Saints", de Jean Raspail. Le roman raconte, dans un temps futur, l'arrivée sur nos côtes d'un convoi de navires transportant des migrants venus de ce qu'on appelait à l'époque le Tiers-Monde, et la réaction désordonnée des institutions et des populations euriopéennes. Le livre a été publié en 1973, il est ressorti en 2011 avec une préface de l'auteur lui-même, intitulée "Big Other", revenant sur les conditions d'écriture et le "message" du livre...

Puis, en avril 2015, sort une compilation de plusieurs ouvrages de Jean Raspail, sous le titre "Là-bas, au loin, si loin". On y trouve : "Le Jeu du roi ; Moi, Antoine de Tounens, roi de Patagonie ; Qui se souvient des hommes... ; Septentrion ; Sept cavaliers".   Elle est préfacée par Sylvain Tesson (né en avril 1972)... Les rédacteurs de la pétition ont corrigé leur erreur. Ce qui reste vrai, c'est le lien entre Jean Raspail et Sylvain Tesson.

 

Jean Raspail et les différentes éditions du "Camp des Saints" (photo FB).

 

La polémique, malgré le soutien de Rachida Dati, ministre de la Culture, Bruno Le Maire, ministre de l'Economie et des Finances et de personnalités plus proches du monde des lettres, pourrait durer. France Info annonce une contre-tribune, soutenant Sylvain Tesson, dans Le Point...