Microfictions 2022, de Régis Jauffret

Déjà, le premier des Microfictions, publié en 2007, avait fait l’effet d’une bombe. Auscultant avec sagacité et une intelligence rare la nature de l’homme, Régis Jauffret aime, voire même prend un malin plaisir, à s’aventurer dans les parties sombres de l’âme humaine. Renouvelant l’exercice avec un second pavé en 2018, l’auteur s’est vu récompensé du Prix Goncourt de la nouvelle. Avec Microfictions 2022, Régis Jauffret poursuit un travail que l’on peut considérer comme une œuvre à part entière.

A l’instar de Claire Castillon avec ses nouvelles "Insecte ou On n’empêche pas un petit cœur d’aimer", Régis Jauffret dissèque au scalpel la société sous toutes ses formes en appuyant généralement là où ça fait mal. Aussi énorme que puisse représenter ce livre de 1022 pages, c’est avec une légèreté déconcertante que l’on entre dans chacune de ces petites nouvelles sorties d’une imagination où le réel s’accommode de la fiction. Avec Régis Jauffret, aucun frein. Toutes les conditions sociales sont passées en revue. Les personnages principaux sont des femmes, des hommes et des enfants que l’on découvre à un moment de leur vie. A un moment charnière où tout bascule. Écrit avec en toile de fond la covid, ces nouvelles auscultent les histoires d’amour, la crise économique, les chutes, le racisme, les désirs avec leur côté sombre.

Régis Jauffret aime les hommes ordinaires devenant de véritables personnages à qui il invente de l’extraordinaire, un instant romanesque. "Microfictions 2022" est un excellent livre dont les nouvelles forment un trait d’union avec des phrases fraîches balayées par un souffle neuf rempli de becs féroces. Régis Jauffret nous le rappelle : « Le monde est un dessin fait de milliards de gens. Ils toussent, disparaissent et l’image s’efface peu à peu. »

Pascal Hébert

Microfictions 2022, de Régis Jauffret.
Éditions Gallimard. 1022 pages. 26 €.