Numéro deux, de David Foenkinos

Derrière le succès littéraire et cinématographique de cette saga, David Foenkinos s’est intéressé au jeune garçon qui aurait pu être l’acteur principal, celui qui a frôlé du bout du doigt le graal du cinéma pour devenir une vedette internationale en campant Harry Potter. Mais voilà, alors qu’il était en pôle position pour obtenir le rôle, Martin s’est fait doubler sur la ligne d’arrivée par un autre candidat. Il reste et demeurera tout au long de sa vie celui qui a faillir devenir l’incarnation d’Harry Potter. C’est cette histoire et bien plus encore que nous conte avec brio David Foenkinos en nous faisant découvrir l’impact d’un tel refus chez un jeune garçon.

Martin est le fruit d’un amour franco-britannique. Sa mère française est journaliste et son père, un poète de l’invention qui finira dans les décors du cinéma. Une passerelle pour tenter la chance de son fils dans le casting d’un film prometteur sur la lancée du succès littéraire d’Harry Potter. Avec beaucoup de sensibilité, David Foenkinos nous fait suivre l’évolution de ce casting avec son lot de doutes, d’espérance. Et lorsque la nouvelle tombe pour Martin, comment comprendre les raisons d’un refus qui se transforme en échec personnel. A quoi tient ce petit quelque chose qui fait la différence entre deux personnes en course pour un seul rôle ? En vérité, comme le souligne si bien David Foenkinos dans son roman, peu de choses, voire l’intuition du décideur. Si l’un s’envole vers la gloire, l’autre chute du plus haut de son âme pour errer dans sa propre existence. Et un malheur n’arrivant jamais seul, Martin doit subir le succès des nombreuses sorties littéraires et cinématographiques d’Harry Potter tout au long de son existence. S’il tente tant bien que mal de mettre de côté sa jalousie vis à vis de son concurrent, Martin essaie de survivre à sa déception, la mort de son père et un harcèlement. Comme souvent, le miracle de l’amour sauve bien des situations. David Foenkinos termine son livre en apothéose avec une rencontre extraordinaire entre l’acteur retenu et le numéro 2.

Au gré de son roman, David Foenkinos rappelle cette magnifique phrase de Gustave Flaubert à Louise Collet… qui peut être également méditée par les auteurs : « Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, qui se tiendrait par la force intérieure de son style. » Les réseaux sociaux sont également abordés – égratignés - par le romancier qui fait dire à l’un de ses personnages : « Quand je vais sur Instagram et que je vois la vie merveilleuse des gens, il m’arrive aussi d’avoir l’impression que la mienne est nulle ou ratée. On vit aujourd’hui sous la dictature du bonheur des autres. Ou, en tout cas, leur prétendu bonheur. » Qui dit mieux ?

Pascal Hébert

"Numéro deux", de David Foenkinos. Éditions Gallimard. 236 pages. 19,50 euros.