Le Jour d’avant, de Sorj Chalandon
Publié le Par Pascal Hébert
J.F Paga
Lorsque Sorj Chalandon nous dit qu’il n’écrira plus jamais sur les guerres, on peut le croire. Néanmoins, il faut sans doute ajouter un petit bémol à l’affirmation de ce grand journaliste, également grand écrivain. S’il ne parle plus des guerres classiques, il n’est pas loin des guerres que l’on mène à soi-même ou aux autres. La meilleure preuve nous a été donnée avec son dernier roman, "Le Jour d’avant".
Aussi palpitant qu’un bon policier au suspense insoutenable, Le Jour d’avant nous emmène dans le Nord, ses mines et son cortège d’ouvriers qui ont laissé leurs poumons dans la terre. L’histoire de ce roman prend racine dans la catastrophe de la fosse Saint-André de Liévin du 27 décembre 1974 qui a laissé derrière elle 42 morts et de nombreux blessés. Au Nord, il y a la mine et les champs. Si la mine attire autant qu’elle repousse, elle est l’objet de toutes les attentions. La mort ne cesse de rôder. La vie peut partir à la moindre étincelle. Une fois de plus Sorj Chalandon s’est installé avec toute la sensibilité qui le caractérise dans des personnages à la Zola. Le monde de la mine des années soixante-soixante-dix est dépeint par l’auteur avec un magnifique crayon en charbon. Mais au-delà du trait romanesque, Sorj Chalandon s’est emparé d’une cause qu’il défend bec et ongle jusqu’au point final. Comme dans beaucoup de catastrophes humaines, où d’importants enjeux sont sur la table, les responsables ne se trouvent jamais dans le box des accusés. Le romancier y va de sa part de colère pour venger les victimes, les familles des victimes du manque d’attention apporté à la sécurité des mineurs en ces temps où le profit impose d’être moins regardant. Avec comme fil rouge l’envie de punir les Houillères, Sorj Chalandon va plus loin en révélant des hommes traumatisés par la mine… jusqu’à en perdre la raison.
Pascal Hébert
Le Jour d’avant, de Sorj Chalandon, aux éditions Grasset. 327 pages. 20, 90€.