La force de vie de Charles Biétry
Publié le Par Jacques-Henri Digeon
L'interview de Charles Biétry, touché par la maladie de Charcot, dans l'émission ''Sept à huit'' (TF1) a été d'une profonde émotion mais également une grande leçon de force de vie.
De l'AFP à BeInSport en passant par Canal+, France Télévisions et même la présidence du Paris SG, Charles Biétry, aujourd'hui âgé de 81 ans, a marqué de son sceau l'histoire du sport.
Depuis août 2022, quand il a appris qu'il était atteint de la maladie de Charcot, il se bat. Contre la maladie mais également dans le combat de la fin de vie et du droit à mourir dignement. Il a d'ailleurs tout organisé pour, un jour, partir en Suisse et en finir avec cette vie qui ne lui a apporté que du bonheur. Même si, a t-il confié, le visage grave et au bord des larmes, qu'il n'est pas certain de faire ce voyage, n'imaginant pas sa famille repartir sans lui mais avec l'urne funéraire. Tout cela, il l'a écrit dans son livre à paraître ce mercredi*.
Dimanche soir, dans l'émission "Sept à huit" sur TF1, Audrey Crespo-Mara, l'a rencontré. A ses questions, le journaliste a répondu par écrit avant que l'intelligence artificielle restitue sa voix. Car aujourd'hui, Charles Biétry ne peut plus parler et ne pourra bientôt plus manger normalement. Malgré tout, il continue de sourire et de profiter de ses proches. Un grand moment de force mentale et de pure émotion, une ode à la vie. A l'image de ses devises : « Quand on n'a pas ce qu'on aime, il faut aimer ce qu'on a .» Et la deuxième : « Ce qui compte ce ne sont pas les années qu'il y eu dans sa vie, c'est la vie qu'il y a eu dans ces années. Et la mienne a été belle. »
Morceaux choisis
La maladie. « C'est une torture. Les mots sont dans ma tête et je ne peux pas les faire sortir. Alors on se recroqueville et on risque de ne plus avoir de contact avec l'extérieur. »
Son quotidien. « Je ne m'en sors pas mal par rapport aux copains qui sont en fauteuil. Je n'ai plus d'équilibre mais avec deux cannes anglaises je me fais 200 mètres tous les jours et, quatre fois par semaine, 30 minutes de vélo... »
Sa force de vie. « Je suis vivant. Il me reste quelques semaines ou quelques mois à vivre. Pourquoi voulez vous que je les gâche et que je gâche la vie de mes proches. Je veux en profiter et faire tout ce qui est mon pouvoir pour aider la recherche et les autres malades. »
« Ce Charcot est costaud attaque de toute part et il tue. La maladie me donne donc un rendez-vous avec la mort. Pas sûr que je vienne. En tous cas, je me battrai avant. »
« Je suis en guerre, en guerre contre la maladie. Le sport m'aide tous les jours à haïr ma défaite. »
Sa famille. « Ils sont incroyables. Ils auraient pu pleurer, me montrer de la pitié, changer leur comportement et j'aurais sans cesse vu ma maladie dans leurs yeux. Au contraire tout le monde continue à vivre, à rire à jouer. »
Sa femme. Quand il y a un coup de blues, « C'est elle qui nous remet d'aplomb avec une phrase devenue mythique dans la famille : ''On rira jusqu'au bout ''. Elle m'aide en écoutant. Un regard, un sourire, une caresse, ce sont des instants de bonheur. »
Projet d'aide à mourir. « C'est déjà dur de mourir mais alors mal mourir c'est double peine Souffrir au fond d'un lit d'hôpital, étouffer, ne plus avoir le moindre échange avec ceux qu'on aime et qui ont mal à vous voir espérer la mort tout en sachant qu'il n'y a pas d'issue, c'est dur. Et quand on entend celles et ceux qui militent contre nous qui voulons partir dans la dignité, ou tout simplement choisir en toute liberté, c 'est abject. Une loi donnerait de la sérénité dans la liberté. »
« J'en veux aux députés... » « J'en veux aux députés et sénateurs (pas tous) qui n'ont pas fait le job entre vacances, dissolution, censure , campagne électorale, guerre d'égos... Ils ont oublié les Français. J'attends un sursaut de nos gouvernants qu'ils votent cette loi à l'unanimité et que je puisse attendre la mort tranquillement sans être un boulet pour les miens. »
La mer. « Les vagues me parlent, les vagues m'apaisent et elles changent de discours à chaque minute avec de la tendresse alors que sur la terre la tendresse est rare. »
*La dernière vague . C'est le titre du livre à sortir ce mercredi dans lequel Charles Biétry raconte son parcours professionnel de journaliste mais se confie également sur sa maladie.
"La dernière vague", 252 pages ; éditions Flammarion.
« J’attends un sursaut de nos gouvernants. Qu’ils votent cette loi à l’unanimité. Et que je puisse attendre la mort tranquillement. »
Charles Biétry, au sujet de la loi sur la fin de vie, dans Le Portrait d’@audrey_crespo. #septahuit. pic.twitter.com/nkI18NYABb