Tour de France (1er - 23 juillet) : Richie Porte l’épouvantail
Publié le Par Jacques-Henri Digeon
Samedi, le 104e Tour de France s’élancera de Düsseldorf (Allemagne). Chris Froome partira favori mais suscite des interrogations. Il devra compter avec des rivaux ambitieux dont Richie Porte qui fait figure d’épouvantail.
Froome favori mais… Trois fois vainqueur, Chris Froome (Sky) ambitionne secrètement de rejoindre Anquetil, Hinault, Merckx et Indurain et leurs cinq victoires. En 2015, il aura, plus que les autres osé et surpris : osé attaquer dans une descente au style improbable (mais qui a fait des émules), osé accompagner Sagan dans un final de baroudeur et surpris en courant dans le Ventoux… en attendant d’être dépanné ! Cette année, le Britannique a semblé moins à l’aise dans les épreuves de début de saison et, récemment dans le Dauphiné où il a alterné le bon et moins bon. Mais il affirme être prêt. Avec ça, l’équipe britannique, confrontée à une crise de croissance et à des suspicions quant à la crédibilité de l’organisation mise en place par son manager Dave Brailsford, apparaît moins dominatrice, moins soudée. Réalité ou illusions ? Fromme favori oui, mais avec des points d’incertitude.
Bardet et la pression. 2e place 2016 oblige, il serait indécent de ne pas voir Romain Bardet (AG2R) en adversaire numéro un de l’Anglais. Même s’il n’a pas forcément été à son avantage dans le Dauphiné, il semble avoir programmé la forme optimale pour ces trois semaines de juillet. Mais s’il avait pu surprendre tout le monde dans l’étape du Bettex en 2016, on peut penser qu’on ne lui signera pas le moindre bon de sortie. Et puis, le plus dur sera pour lui de confirmer et de répondre aux espoirs que les Français attendent depuis… Hinault, depuis trente deux ans ; en clair de gérer la pression.
Quel Quintana ? Troisième homme, 3e l’an dernier, on dit Naïro Quintana (Movistar) capable des plus grandes envolées, doué de l’aptitude à la très haute montagne et de démarrages de feu… Mais franchement, on attend encore. Et dans le 100e Giro pourtant taillé à sa mesure, il n’a jamais pu exprimer ses talents et surtout les convertir en succès face à un étonnant Tom Dumoulin. Qu’en sera-t-il sur le Tour et ce Giro ne lui laissera t-il pas quelques traces dans les jambes ?
Les francs-tireurs. Il n’est peut-être plus ce qu’il était mais Alberto Contador (Trek) est le seul, susceptible de dynamiter la course avant même l’ultime montée. Mais s’il a conservé ce tempérament offensif et ce panache, l’Espagnol a perdu sa ‘’grinta’’ et ses accélérations dévastatrices qui secouaient ses adversaires. Autre tête d’affiche jusqu’à présent réduit au second rôle dans le Tour où il manque encore d’expérience, Fabio Aru (Astana). On ne connaît pas les limites de l’Italien mais son titre de champion national vient à point nommé pour confirmer sa forme… et peut-être ses ambitions. Il partagera en outre le rôle de leader avec Jakob Fuglsang, étonnant et opportuniste vainqueur du Dauphiné. Ces trois là pourraient en tout cas jouer en francs-tireurs et s’allier avec d’autres selon les circonstances.
LE client. Celui-là, c’est un gros ’’client’’, celui qui fait peur à tous les autres. Richie Porte sait tout faire sur un vélo : il roule, il grimpe, il a du punch, il ose. Et en prime, il semble avoir pris confiance en lui. C’est l’épouvantail de cette nouvelle grande boucle qu’il a terminé 5e l’année dernière. Froome lui-même n’en fait-il pas le favori même si c’est une manière de se libérer de la pression. Trois interrogations pourtant pour l’Australien: son équipe (BMC) aura t-elle les moyens de supporter le poids d’un lauréat potentiel ? Tiendra t-il la distance sachant qu’il est parfois sujet à des ‘’trous’’ comme lors du récent Dauphiné (2e) où il a pris un coup de mou dans le col de Solaison ? Enfin, saura t-il réagir tactiquement lui qui pêche parfois par manque de jugeotte ? Si c’est trois fois oui, il pourra mettre tout le monde d’accord !
Et aussi… Ils ne seront pas prétendants à la victoire finale mais pourraient marquer le Tour de leur empreinte. Le surdoué et fantasque Peter Sagan (Bora) briguera un nouveau Maillot vert. Mark Cavendish Dimension data) qui se remet d’une mononucléose se lancera à la poursuite du record d’étapes de Merckx ; il en est à trente, il lui en manque quatre. Tony Martin (Katusha) comptera sur les chronos de Dusseldorf le premier jour et de Marseille à la veille de l’arrivée. Après un tour d’Italie quand même réussi (4e), Thibault Pinot (FDJ), 4e du récent Giro, a annoncé qu’il courrait sans la pression du résultat et se contenterait d’une belle étape. Son équipier Arnaud Demare aura l’occasion de se mêler aux sprints avec le gratin mondial tout comme Nacer Bouhanni (Cofidis). Enfin, on suivra les possibles trouble fêtes : le toujours jeune Alejandro Valverde (Movistar), les valeurs montantes Simon Yates (Orica), Bauke Mollema (Trek) Janez Barjkovic (Barhain) et autre Warren Barguil (Sunweb).
Enfin, s’il n’est candidat qu’à un coup de baroudeur, le toujours populaire Thomas Voekler disputera son dernier Tour pour le plaisir avant de raccrocher son vélo; une victoire d’étape conclurait une superbe carrière et déclencherait à coup sûr les passions…