Deux ou trois choses que l'on sait de la crise... en 2014
Publié le Par Un Contributeur
A chaque année suffit sa peine, aimerait-on penser. Depuis 2007, la crise multiforme apparaît ici, se cache là. On la croit terminée et la voilà qui renaît, remettant nos certitudes en cause. Par Antoine Laray
2014 s’est invité au chevet de nos économies. Sur les décombres de la crise, le système américain résiste et la Chine s’inquiète d’un emballement bancaire…
L’Europe tente de reprendre en main son système financier et la France compte ses chômeurs, les victimes très réelles d’une finance trop virtuelle.
L’Europe des banques
En 2014, le chantier de l'Union bancaire sera encore loin d'être achevé, car seul le mécanisme de surveillance unique (MSU) au niveau européen sous la coupe de la Banque centrale européenne a été mis en place. Il sera fonctionnel en novembre 2014. Celui de la résolution bancaire, qui doit assurer le sauvetage des banques au niveau européen en cas crise, pour que les États membres n'aient pas à le faire en est quant à lui à ses balbutiements. Il ne sera pas pleinement opérationnel avant dix ans.
Le terrain est-il miné ? En février, la BCE doit réaliser une grande revue de la qualité des actifs (AQR) des banques de la zone euro, alors que le montant des créances douteuses qu'elles détiennent a doublé depuis 2008. Seules les plus grandes d'entre-elles, considérées comme systémiques, feront l'objet de ce « stress test », soit 130 au total.
Un loup se cacherait-il encore dans le marigot bancaire ?
La BCE se retrouvera alors face à une alternative. Si elle annonce que le système bancaire européen est solide, les banques pourraient rechigner à mettre au pot les 55 milliards d’euros du fonds de solidarité. Elles peuvent aussi se voir conforter dans leur attitude frileuse vis-à-vis des prêts aux entreprises.
Si la banque centrale révèle des failles dans le système, elle pourrait alors provoquer la panique qu'elle cherche à tout prix à éviter. Cas de la Grèce à part, c'est déjà de là qu'avait démarré la crise des dettes souveraines de l'Espagne et de l'Irlande notamment.
La dette publique
En 2014, la crise de la dette publique menace. En France, alors que tous ses voisins, y compris ceux du sud, ont réussi à réduire le poids des dépenses publiques dans leur PIB et à contenir leur pression fiscale, le ratio dépenses publiques/PIB est de 57,1% (le niveau le plus élevé de la zone euro juste derrière la Finlande avec 57,8%) et pourrait même atteindre un nouveau record historique. Il n’est « que » de 49,8% pour l’UEM dans son ensemble et de 44,8% en Allemagne. La France est attachée à défendre son système social. Un chiffre : la croissance des prestations sociales a crû de 80% entre 1980 et 2012. Autre source de dépenses : le système de retraites lié au vieillissement de la population. Nouvel enjeu en 2014, la proposition faite par François Hollande aux entreprises d’un «pacte de responsabilité» fondé «sur un principe simple: moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur leurs activités et, en contrepartie, plus d'embauches et plus de dialogue social».
Les assises de la fiscalité, annoncées cet été, devraient justement débuter, mi-janvier, leurs travaux sur les impôts des entreprises. Par ailleurs, le gouvernement a saisi le 19 décembre le Haut Conseil du financement de la protection sociale pour réfléchir à une baisse des charges pesant sur le travail. L'institution doit rendre son rapport en mai, une concertation suivra avec les partenaires sociaux.
Reste que les entreprises ne suivront que si elles voient leurs charges réellement baisser. Côté charges sociales, les choses semblent bien parties. Le gouvernement est prêt, sous réserve d'un accord des partenaires sociaux, à une diminution, voire à une suppression, de tout ou partie des quelque 35 milliards de cotisations familiales acquittées par les entreprises. La question sera comment les financer ? Par une hausse de la TVA, de la CSG, ou par de nouvelles économies sur la dépense publique.
Les bonnes heures du CAC
Il ne faut pas croire que l’industrie en France va forcément mal. Un chiffre pour se convaincre : le CAC 40 a gagné 18% en 2013, sa meilleure performance en cinq ans.
36 des 40 composantes de l’indice parisien terminent l’année en hausse, et environ un quart bondissent de plus de 40 %. L’entreprise ne connaît pas forcément la crise. Mais les profits vont surtout aux actionnaires, souvent des fonds de pension étrangers, et non aux salariés. L’actualité récente a montré que l’enrichissement de dirigeants par le biais de prime ou de retraites chapeau devient intolérable aux yeux des salariés qui, quand ils sont licenciés, n’ont souvent que leurs yeux pour pleurer.
Enfin, dernier rendez-vous en 2014 : les élections du Parlement européen qui pourraient se traduire par une montée des nationalismes. Ce ne serait pas le moindre des dangers, pour l’Union européenne.
Antoine Laray est journaliste économique et financier
A conseiller : la publication annuelle de l'OFCE : "L'économie française en 2014" (124 pages) - Editions La découverte - www.collectionreperes.com