Le samedi, pro et anti chasse à courre se surveillent
Publié le Par Fabrice Bluszez
Pour ou contre la chasse à courre dans les forêts d'Île-de-France... Une double rencontre...
En forêt de Compiègne et de Laigue, dans l'Oise, les passionnés de chasse à courre et les opposants se côtoient chaque samedi. La vénerie a ses fans, plaidant la tradition, et ses détracteurs, regroupés au sein d'AVA (Abolissons la vénerie aujourd'hui).
Samedi 8 février 2020 : les marcheurs
Ils sont en gilets jaunes marqués "J'aime la chasse" et suivent la chasse à courre en surveillant les militants d'AVA... Celui qui parle est Fabien Létoffé (à droite sur la photo).
« AVA, ça a été constitué depuis l'incident du 21 octobre 2017... » L'affaire de Monsieur Drach ? « Tout est parti de là, c'est à partir de là que ça a pris de l'ampleur. Mais si ça n'avait pas été le 21 octobre 2017, ça aurait été plus tard. Le groupe AVA avait quand même constitué un noyau qui comptait bien saboter les chasses. Ils utilisent la citronnelle pour dérouter les chiens. Il y avait de l'agression envers les veneurs. Ils faisaient monter la tension dans les forêts lors des jours de chasse. Donc on s'est dit que ça pouvait pas continuer comme ça. Plusieurs veneurs se sont réunis et Laurent Facques a suggéré : et si on pratiquait l'arroseur arrosé ? On va marcher un samedi. Pas que pour les gêner. Aujourd'hui, il n'y a pas de délit d'entrave, c'est juste une contravention : il faut qu'elle soit caractérisée par les autorités compétentes. Et elles nous disent que c'est très difficle. Alors si ce n'est pas possible de les freiner par rapport à ça... La chasse à courre est une activité légale, que ça vous plaise ou non. Donc on a mis en place le dispositif des marcheurs, qui doit permettre de les encadrer, de mettre en exergue l'entrave et puis de les freiner. Nous, c'est notre passion. On peut être opposé mais sans agir de cette manière-là, sans arrêter les chiens violemment, sans provoquer les gens... On peut être opposé. Vous marchez pacifiquement mais ça s'arrête là.
Petit à petit, ça s'est mis en place et ça s'est répandu. AVA aussi s'est répandue dans toute la France. Ça s'est étendu à d'autres équipages qui sont victimes de sabotages. Et l'année dernière, pas de loin de 800 marcheurs se sont, à tour de rôle, mobilisés, dans toute la France. En Picardie, AVA revendique une antenne à Chantilly, une à Compiègne, une à Saint Gobain, une antenne à Villers-Cotterêts. Sauf qu'en réalité c'est juste un petit noyau dur composé d'une vingtaine de personnes dont le leader AVA France est là, c'est Stanislas Broniszewski.
En forêt de Compiègne il y a plusieurs équipages qui chassent d'autres gibiers que le cerf. Ici, vous êtes avec la Futaie des Amis, qui chasse le cerf, et que les gens de AVA affectionnent particulièrement d'ailleurs. Ce qu'il se passe concrètement : une fois qu'on a repéré les premiers opposants à la chasse, qui sont connus, ce sont des habitués, ce n'est pas le riverain anti chasse ou qui a de préjugés, c'est du militantisme pour la cause animale... Eux se présentent comme de simples riverains opposés à la chasse sauf que c'est faux. Aujourd'hui il y a 12 AVA, c'est comptabilisé, pour une trentaine de marcheurs. Ils sont aussi en voiture. Les AVA, il y en a qui ont des difficultés motrices alors certains servent juste de taxi. Ils récupèrent les AVA qui sont sur le terrain. Nous, c'est pareil... On a des gens qui sont taxis, d'autres qui marchent derrière les AVA et on les suit en permanence pour les encadrer, pour éviter que les tensions ne s'accentuent du côté pro et du côté anti. Il ne faut pas qu'il y ait de provocation. Notre rôle, c'est de les encadrer. Et vérifier qu'ils ne font pas d'entrave à la chasse. »
Ce samedi-là, un cerf est mort, abattu près avoir tenté de traverser une route...
Les militants d'AVA passent la journée, en général le samedi, à suivre la chasse à courre. Et ce soir-là, tout le monde s'est retrouvé pour une photo de groupe autour de Stan Broniszewski. La personne qui parle est Adrien Lestienne, le samedi 15 février.
« Tous les samedis, il y a les gilets jaunes. Aujourd'hui, ils sont très nombreux, une trentaine au moins. Samedi dernier, quand il y a eu le cerf mort sur la 31 (ndlr : il a été abattu), il y a eu du monde. Soi-disant qu'il a été tapé par une voiture mais inous n'avons pas vu de voiture accidentée dans le coin. On était tout près. On a suivi le cerf de A à Z. Ils récupèrent le cerf qu'ils ont chassé toute la journée mais ça ne compte pas. Ils en ont tué 14 sur Compiègne, depuis le début de la chasse, en septembre. Elle dure jusque fin mars. Et après, il ont quand même des jours de rattrapage, pour compenser ceux où ils n'ont pas pu chasser.
Dans les gens de la forêt, il y a de tout. Quand on est au bord de la route, des fois, on se fait klaxonner. Ce sont des usagers de la route qui sont contre la chasse à courre et qui ne sont pas de AVA. Et les gens qui se promènent râlent à cause de la vitesse des véhicules qui empruntent les voies normalement utilisées par les piétons. Les usagers de la forêt ne sont pas pour la chasse à courre à 100%. Il y en a très peu. Les gens ont peur des chiens, des voitures, des 4x4 surtout. Il y a une centaine de voitures sur Compiègne, plus des vélos. Tout à l'heure, France24 interviewait un gilet jaune. il venait de Saint-Gobain, uniquement pour suivre AVA. Ils sont vraiment motivés.
Nous, on a moins de monde qui nous suit. Mais eux, c'est leur passion. On joue sur les médias, nous. Parce que l'opinion publique va nous écouter. Parce qu'elle est intéressée à savoir ce qu'il se passe dans nos forêts. Tandis que la chasse à courre, elle va chercher à cacher la finalité de ce qu'ils font. Ce qu'ils font avec le cerf, ils vont le cacher. leur communication est fausse du début à la fin. Ils disent que c'est le travail des chiens. Mais quand un chien se fait buter, ils n'en ont rien à faire. Quand un cheval fait une rupture d'anévrisme, ils n'en ont rien à faire. Donc en fin de compte, il n'y a que leur petit bonheur et leur petite cruauté qu'ils aiment. Ils disent aimer les animaux mais quand on voit comment ils les traitent. Surtout à Compiègne où les chiens sont dans un état pitoyable.
Quand les chasseurs sont derrière le cerf, ils font fuir aussi les autres animaux de la forêt. Une biche peut traverser, prendre une bagnole... »
Ce samedi-là, la chasse s'est terminée sans mort du cerf. Les militants ont rejoint la zone du Vivier Corax pour se retrouver autour de café, thé, boissons et petits gâteaux, servis à l'arrière d'une des voitures.
Sur Facebook, on retrouvera les pages AVA CompiègneLaigue et Défendons la vénerie aujourd'hui contre AVA. Deux vidéos récentes des deux groupes...
DVA