Le camp de réfugiés du Jardin d'Eole évacué
Publié le Par Fabrice Bluszez
C'est quoi, un camp de migrants, dans Paris ? Visite, ce jeudi 2 juin, de 17 à 18 heures, à celui du Jardin d'Eole, dans le 18e arrondissement. Il a été évacué ce lundi 6 juin.
D'abord, une carte pour situer. On est au nord, à 200 mètres à peine de la station de métro Stalingrad. Il y avait des tentes sous le métro aérien dans cette zone. L'évacuation a eu lieu il y a un mois, le 3 mai. Le samedi 4 juin, on annonçait une évacuation pour cause de cas de tuberculose, selon Le Figaro. Elle a eu lieu ce lundi 6 juin.
« Ça fait trois semaines qu'ils sont là », dit une dame à propos du nouveau camp... Une semaine donc pour revenir, replanter des tentes. Et la vie reprend. Première photo à 16h30. Vers 17 heures, l'Armée du Salut distribue un repas. Dernière photo vers 17h30.
Rue du Département. Le fourgon de Médecins du Monde sert de dispensaire.
C'est un peu à l'écart. On vient ici demander quelques médicaments. Le camp est plus bas dans la rue.
Le jardin d'Eole, coincé entre les voies ferrées et la rue d'Aubervilliers, a été fermé.
Sur le trottoir, une file d'attente est délimitée. A droite, un car de police.
En fait, il y a deux cars de police. Les gens se massent au bord du carrefour.
La rue d'Aubervilliers, en sens unique, descend vers le sud. Le camp est sur la gauche, derrière la voie cycliste.
Les tentes débordent un peu sur la piste cyclable. En amont, une dame à vélo râle parce que les piétons sont sur "sa" voie. Les piétons s'étonnent. Plus loin, il y a les tentes. La dame devra rejoindre la chaussée des voitures.
Des tentes Quechua surtout, faciles à monter, pas chères... Posées sur des palettes pour isoler du sol. Il pleut depuis quelques jours.
Par-dessus les tentes, des bâches en plastique permettent de mettre le nez dehors sans subir la pluie. Dans les tentes, on discute, on rigole aussi.
Une femme. On en voit peu. Ce sont surtout des hommes, jeunes, moins de 30 ans en général.
Le camp s'allonge sur la rue d'Aubervilliers. Il n'est pas dans le jardin. La voie cyclable assure une relative sécurité par rapport à la circulation.
Lui a les mains dans les poches mais l'autre personne a des écouteurs. Souvent, les gens tiennent un portable à la main, sont en contact avec d'autres personnes. On nous a demandé d'indiquer en français à un interlocuteur où nous étions exactement.
A force de remonter le camp, on arrive au bout. Il y a trois latrines. Il y en avait trois aussi à l'entrée. Pour une centaine de tentes au moins, 300 à 500 personnes selon l'Armée du Salut, c'est peu. Alors, forcément, ça sent un peu le pipi, alentour... « Ils ont fermé le jardin », proteste Cheik.
La photo est floue. Mais tout cela est un peu compliqué. La toile de tente est la seule barrière entre ce chez soi fragile et la rue. Si on ouvre, on entre immédiatement dans 2m2 d'intimité faite d'un duvet, de couvertures et de quelques vêtements...
Retour vers le carrefour. D'où viennent ces réfugiés ? « Afghanistan,Erythrée... », avance l'Armée du Salut.
Les tentes sont collées les unes aux autres. les fils se croisent, rendant les déplacements difficiles. Il faut se baisser souvent, enjamber le mobilier urbain, les murets, les flaques d'eau...
Le gars à côté du fourgon rouge a apporté des cartons que le campeur place au fond de la tente. Apparemment, celle-ci est à même le bitume.
Au carrefour, le camion de l'Armée du Salut est ouvert par les bénévoles en gilet jaune. Ils ont des bouteille d'eau mais aussi le repas du soir.
Petite plongée dans le camp. Ici ou là ,des sacs ou des vêtements, des couvertures trempées après deux ou trois jours de pluie, inutilisables.
Les gens ne sortent guère ou ceux qui sont sortis attendent la nourriture dans la file.
Les palettes, les tentes, les fils, les bâches... Le problèmes de ces tentes à un seul toit, c'est que si la pluie persiste, il se produit une brumisation de l'eau à travers la toile... Si on dort, ça va, si on bouge, on touche la toile mouillée... Si on sort, on rentre avec des vêtements mouillés eux aussi. Et rien ne sèche vraiment.
Près du kiosque, des mousses abandonnées.
Un point d'eau. Un des rares points d'eau, que la mairie avait coupé. Les migrants ont bloqué la rue. La mairie a rouvert l'eau.
Le linge étendu sèche. La différence avec chez vous, c'est qu'il ne sort pas de la machine à laver, il sèche, c'est tout.
La disribution a dû commencer, des bouteilles d'eau apparaissent.
Ça s'organise. Des tables ont été installées à l'arrière du camion. Les gens descendent la rue en file et passeront par là pour être servis.
« Par deux ou par un, les desserts ? » demande une bénévole. Ce sera par un. On n'en est encore qu'à l'installation.
Alors eux, ce sont les responsables de l'Armée du Salut venus sur place. Avec une journaliste qui pose des questions et prend des notes.
Le gars qui tend le bras, c'est Cheik. Enfin il dit qu'il faut l'appeler comme ça mais il se revendique Africain, sans vouloir préciser de quel pays. Il revendique beaucoup, d'ailleurs, dans un discours où se mêlent le pillage de l'Afrique et l'accueil trop sommaire fait aux réfugiés. Il parle français, alors il s'adresse aux journalistes de partout et ici aux responsables de l'Armée du Salut. Il est déjà passé à la télé. Beaucoup de télés même, dit-il...
Presque prêts. Tout est en place, la distribution du repas va pouvoir commencer. Il est payé par la Mairie de Paris. « Pour 300 personnes au début mais bien 500 maintenant », selon l'Armée du Salut.
C'est complet. Entrée, salade, produit lacté, une grande canette d'Orangina... « Pas de viande », explique l'Armée du Salut. Voilà résolu le problème de la nourriture halal. Sinon, à quelques centaines de mètres, avenue de Flandre, il y avait voici un mois la distribution de l'association Chorba pour tous.
Encore une photo floue, à travers les fenêtres de plastique de la grande tente carrée. C'est comment, le repas des migrants ? C'est comme ça, assis sur le matelas lui-même posé sur des cartons... Une petite barquette et une fourchette en plastique... On notera le souci d'isoler : la grande tente, c'est bien la journée, mais la nuit, évidemment, ce n'est pas chauffé, donc c'est aussi froid que dehors...
Il y a toujours des audacieux qui tentent d'entrer dans la file par le milieu sous des prétextes divers. « Il y a parfois des bagarres », regrette une cliente du Franprix, sur le trottoir d'en face. Les bénévoles tentent de faire respecter l'ordre. Sinon, ce sera la police. Et comme personne n'a intérêt à être embarqué...