L’extrême-droite, ce nouveau mal européen.
Publié le Par Jennifer Declémy
Le score de Marine Le Pen révèle une percée inquiétante de l'extrême-droite dans le paysage politique français, qui s'explique par de nombreux facteurs. Cependant, une telle percée n'est pas unique en Europe.
Le score de Marine Le Pen obtenu à l’issue du premier tour met en exergue un mal dont souffre la plupart des grandes démocraties occidentales : la montée en puissance d’une extrême-droite qui n’a rien à voir avec celle que l’on connaissait par le passé, et qui se base aujourd’hui sur une puissante islamophobie, sur fond de peur panique devant la mondialisation.
« A travers toute l’Europe, la crise provoque des fièvres populistes » explique le politologue Olivier Ferrand, qui y voient « les mêmes symptômes : repli identitaire, ressentiment social et plus largement la recherche de solutions alternatives face à l’échec des partis de Gouvernement de droite comme de gauche ». Un phénomène aujourd’hui constaté en Autriche, en Italie, aux Pays-Bas, en Suède, au Danemark, en Suisse mais aussi en France, qui est aujourd’hui le pays européen où l’extrême-droite est la plus forte.
Cette montée d’une nouvelle extrême-droite en Europe s’explique par plusieurs facteurs dont les plus importants sont l’actuelle crise économique, l’incapacité du pouvoir politique à surmonter les problèmes économiques mais aussi l’approfondissement de la mondialisation qui effraie des populations pas ou peu préparées à cette ouverture au monde qui bouleverse les fondements mêmes des identités nationales et les repères nationaux.
Pour faire face à ces inquiétudes et ces peurs, ces nouveaux partis d’extrême-droite mettent en avant « les caractéristiques communes du peuple européen et leurs différences par rapport à en-dehors » explique Jean Faniel et « l’islam nous est proposé comme un adversaire de substitution, comme il faut toujours un adversaire depuis que le communisme a disparu » renchérit Emmanuel Terray qui estime que de par ces caractéristiques, l’immigré devient un bouc-émissaire privilégié pour la droite.
Le Front National n’est donc pas le seul parti à voguer sur cette nouvelle idéologie de la droite. Partout en Europe fleurissent des partis de la sorte, qui peu à peu rentrent au pouvoir, ou du moins influencent la politique gouvernementale : les Vrais Finlandais au printemps 2011, les Démocrates de Suède en septembre 2010 ou encore le parti de Geert Wilders aux Pays-Bas sont des exemples de ce mouvement ascendant qui aujourd’hui menace l’Europe. De tels partis sont en passe de s’imposer dans la mesure où ils ont renoncé aux propos antisémites ou négationnistes qui ne pouvaient pas réussir étant donné le traumatisme de la Seconde Guerre Mondiale. Au lieu de stigmatiser les juifs, c’est désormais aux immigrés de remplir le rôle de bouc émissaire face à un contexte socio-économique catastrophique.
Le dernier facteur qui permet à l’extrême-droite de gagner en puissance, ce sont les liens qui s’établissent entre la droite et l’extrême-droite, à savoir une rupture des cordons sanitaires qui existaient il y a dix ans. En France, c’est Nicolas Sarkozy qui a rompu la digue en adoptant une grande partie du vocabulaire et des thématiques du Front National. Le piège s’est cependant retourné contre le chantre de la « droite décomplexée ». Le risque aujourd’hui est que la droite républicaine se désintègre et que l’extrême-droite devienne un des pivots principaux de la vie politique française.