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Proche-Orient : Les Russes embourbés

Publié le  Par Patrick Béguier

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Il a presque fallu supplier la Russie pour qu'elle accepte une trêve humanitaire en Syrie. Poutine est-il donc le maître du jeu au Proche-Orient ? Pas si sûr !

  Le "cataclysme humanitaire" - pour reprendre l'expression de Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères -, qui se produit depuis une semaine dans l'enclave rebelle de la Ghouta orientale, en Syrie, révèle à quel point la situation au Proche-Orient est devenue aussi tragique qu'inextricable. Encore une preuve : la trêve humanitaire votée hier à l'ONU vole déjà en éclats !
  La Russie continue à soutenir un Bachar Al-Assad qui n'a qu'une obsession : reprendre tout le territoire perdu et ne rien lâcher à quelle opposition que ce soit. Le protecteur est désormais prisonnier de son protégé. Il ne parvient pas, au fil de rencontres et de conférences improbables, à faire progresser la diplomatie et à imposer une paix, même cosmétique, au maître de Damas qui reste droit dans les bottes trouées, ensanglantées, de sa dictature. Tant d'efforts stratégiques, tant de bombardements aériens, tant de soldats ou miliciens russes tués (souvent au grand désarroi de la population russe elle-même), tant de risques pris devant la communauté internationale, pour se retrouver dans un bourbier.   Guerres après guerre   Les Russes sont débordés, par l'intransigeance du régime syrien, comme on vient de le dire, par le soudain appétit territorial et l'expansionnisme religieux des chiites de Téhéran, par la fureur des Israéliens qui, dès lors, s'estiment encore plus menacés et sont prêts à contre-attaquer (comme on l'a vu à la conférence sur la sécurité de Munich où Benjamin Netanyahu a brandi un morceau de métal provenant d'un drone iranien abattu par Tsahal), par la hantise de la Turquie qui vient d'engager le combat avec les Kurdes dans le Rojava… L'élimination de Daesh n'a pas signé la fin d'une guerre. Elle a ouvert la porte à d'autres guerres ! Les Russes ont voulu prendre pension au Proche-Orient, avec quelques bases militaires, des avantages économiques durables et une auréole de puissance internationale capable de faire pâlir les étoiles du drapeau américain. Mal leur en a pris. La tragique invasion de l'Afghanistan ne leur a pas servi de leçon. Nous voilà tous enfermés, désormais, dans un immense magasin d'explosifs.
  Paris Dépêches avait déjà exprimé ses inquiétudes en octobre 2015, lorsque la Russie avait décidé d'entrer dans le "jeu" syrien et nous nous étions alors permis d'évoquer (en faisant sourire nos confrères) la possibilité d'une troisième guerre mondiale. Pourvu que la possibilité ne se transforme pas en probabilité !   Patrick Béguier
est journaliste et écrivain.