Ce que va changer la nouvelle loi sur le harcèlement sexuel
Publié le Par Julie Catroux
Présenté hier en conseil des ministres, le projet de loi visant à restaurer le délit de harcèlement sexuel dans le droit pénal apporte de sérieuses avancées selon les juristes.
L’abrogation le 4 mai par le Conseil constitutionnel de la loi qui réprimait le harcèlement sexuel en France avait provoqué un vide juridique et par conséquent l’extinction des affaires en cours. Le gouvernement a présenté un projet de loi visant à restaurer ce délit dans le droit pénal. Me Claude Kantz et Me Nicolas Guerrero ont décrypté pour l’Express le projet de loi concernant le harcèlement sexuel. Tour d’horizon de ce qui va changer.
« Le nouveau texte n'est pas plus précis. Il est simplement plus clair, alors que l'ancien ne l'était pas du tout », déclare Nicolas Guerrero, avocat au barreau de Paris. Alors que l’ancien texte définissait le « harcèlement sexuel comme le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle », le projet de loi prévoit plusieurs formes de harcèlement. Les sanctions peuvent donc varier et aller jusqu’à 3 ans de prison et 45000 euros d’amende. « Il est très positif de préciser ce genre de situations. Ce sont des éléments matériels d'incrimination qui manquaient précédemment », souligne Claude Kantz, inscrit au barreau de Paris et spécialisé en droit social avant d’ajouter « Ce qui est également très intéressant c'est que le délit de harcèlement sexuel est constitué même si l'auteur n'a pas l'intention d'obtenir des relations sexuelles ».
Toutefois la complexité du projet de loi est avérée aussi bien par les spécialistes du droit que par les associations des victimes. « Ce qui me gêne, c'est que la première sanction, fixée à 15 000 euros et un an d'emprisonnement, vise des gestes, propos ou tout autre acte à connotation sexuelle imposés de façon répétée à la victime. Or, auparavant, un seul acte suffisait. Mais le deuxième échelon, qui double ces sanctions, dit qu'il y a harcèlement sexuel si il existe des ordres, menaces ou contraintes, et ce même si le caractère répétitif de l'acte n'est pas établi » affirme Claude Kantz. En outre, il regrette que « la loi ne s'inspire pas suffisamment de la directive européenne du 23 septembre 2002 qui définit le harcèlement sexuel comme un comportement non désiré à connotation sexuelle ».
Les associations sont également mitigées sur ce projet de loi. Dans un communiqué, l’association « Osez le féminisme » a estimé que malgré le fait que le nouveau texte définit mieux le harcèlement sexuel mais que « le projet de loi n’est toutefois pas totalement satisfaisant en l’état ». Toutefois, les peines prévues ne sont pas satisfaisantes car « elles sont inférieures, par exemple, aux peines prévues pour l'infraction de vol » déplore l’association. L’association européenne contre les violences faites aux femmes au travail et l’association Osez le féminisme appellent à un rassemblement en soutien aux victimes ce aujourd’hui à 18 heures place Colette à Paris.