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Gouvernement : Manuel Valls succède à Claude Guéant

Publié le  Par Jennifer Declémy

Crédit image © Jacky Naegelen/Reuters


La nomination de Manuel Valls place Beauvau suscite déjà quelques inquiétudes dans le milieu associatif qui craint que l'homme ne soit qu'une réplique de Claude Guéant. Le nouveau ministre cultive en effet depuis des années une réputation de "monsieur sécuritaire" qui l'a naturellement amenée à ce poste.

 

Nicolas Sarkozy le voulait comme ministre de l’ouverture. Proche de DSK, il avait choisi François Hollande dès le mois de juin, lui promettant qu’au premier tour de la primaire il le rallierait sans faute. A droite de la droite de la gauche, au point où on se demande s’il ne serait pas mieux au Modem et l’UMP, qui d’ailleurs le trouvent très à leur goût, c’est donc lui qui devient le nouveau ministre de l’intérieur. Une posture parfaite pour un homme très sécuritaire, mais qui devra faire face à des dossiers très sensibles dès son arrivée au Gouvernement.

Cela fait des années que le député-maire d’Evry se consacre aux questions de sécurité et d’immigration, souvent à contre-courant de son propre parti effrayé par ses positions un brin droitières. Des quotas pour l’immigration, une dénonciation du laxisme supposé des juges et engouement pour la vidéosurveillance : autant de positions qui le positionnent à droite du Parti Socialiste.

Dans son dernier livre publié en 2011, Manuel Valls estimait qu’en matière de sécurité, « la gauche avait un rôle historique à jouer pour répondre au besoin de sécurité tout en se préservant de toute dérive autoritaire et sécuritaire ». Dans le même temps, il veut faire bouger les lignes d’un parti souvent taxé d’angélisme dans ce domaine.

Maire d’une grande ville d’Essonne depuis onze ans déjà, c’est à Evry justement que le nouveau ministre a pu expérimenter ses idées et convictions en matière de sécurité. Vidéosurveillance, police de proximité, les habitants d’Evry saluent en grande partie son bilan en matière sécuritaire dans leur ville de 55 000 personnes, et confient volontiers que l’homme a une sacrée poigne qui lui sera bien utile dans son nouveau travail.

Dans cette ville Manuel Valls a triplé les effectifs de police, déclaré la guerre aux voyous et multiplié les caméras de videosurveillance, dont pourtant la gauche n’était pas très fan dans les années 2000. Ce dont lui sont redevables les habitants. En revanche son intransigeance en matière de laïcité, et certains de ses propos, font grincer des dents. En 2002 quand il s’acharne contre l’ouverture d’un franprix halal à Evry, quand il vote la loi contre la burqa ou quand il déclare qu’il faut qu’on rajoute « quelques blancs, quelques white, quelques blancos » dans une brocante de sa ville, on comprend pourquoi l’homme est souvent apprécié à droite.

En juin 2009 il défend la proposition de loi contre les bandes portée par Christian Estrosi ; régulièrement il dénonce le « laxisme des juges » dans un langage que l’UMP ne renierait pas ; des propositions pour augmenter les places de prison et appliquer des sanctions immédiates pour les mineurs délinquants. Autant de propositions qui peuvent plaire aux policiers mais qui font déjà râler plusieurs associations qui n’hésitent pas à déclarer voir en Manuel Valls un « Guéant bis ».

Dans les mois à venir, le nouveau ministre va avoir du pain sur la planche d’autant que, au moins jusqu’aux législatives, il aura également la charge de l’immigration. Le nouveau gouvernement a en effet décidé de maintenir le lien entre sécurité et immigration, ce que les socialistes avaient pourtant dénoncé, à raison, quand cela avait été mis en place par Nicolas Sarkozy. « On constate que la conception policière de l’immigration reste imprimée dans ce choix » déplore le président du Gisti. Les associations de défense des sans-papiers ont d’ailleurs vivement critiqué la nomination de Manuel Valls au ministère de l’intérieur. Si ce dernier rassurera certainement la droite et le FN par ses positions dures, il sera sans doute vivement dénoncée par la gauche plus modérée et humaniste sur les questions d’immigration.