Accueil |  Qui sommes-nous |  Contact


Présidentielle : qui fait la meilleure campagne ?

Publié le  Par Jennifer Declémy

Crédit image ©


Il reste deux mois avant le scrutin présidentiel et désormais, tous les candidats sont en lice, battant la campagne avec plus ou moins de succès. Pour le moment, un seul prétendant se démarque de tous les autres.

Il reste encore deux mois mais désormais tous les titulaires sont en lice et on peut déjà faire un premier bilan, d’autant plus que nombre d’entre eux font campagne depuis des mois et des mois. Alors qui pour l’instant réalise un sans-faute ou presque ?

La réponse surprendra, mais incontestablement il s’agit de Jean-Luc Mélenchon. Même si sa campagne est beaucoup moins médiatisée, et donc moins présente dans l’esprit des français, c’est le candidat du Front de Gauche qui aujourd’hui peut se targuer d’un parcours présidentiel réussi. Preuve en est : il est le seul, depuis le mois d’octobre, à ne pas perdre de points dans les sondages mais au contraire d’en prendre, lentement mais sûrement.

Meilleure campagne aussi parce que les autres en face de lui sont hésitantes, pour ne pas dire mauvaises. François Hollande tout d’abord : si le socialiste peut se vanter de moments très forts comme le succès des primaires ou le Bourget, on se souvient aussi des couacs avec EELV et des nombreux couacs de sa campagne qui tendant à la rendre hésitante, malhabile et encore trop « floue » aux yeux des français.

Nicolas Sarkozy ensuite. Si le chef de l’état n’est officiellement candidat que depuis une semaine et demie, personne n’est dupe et cela fait en réalité des mois que le manège dure. Sa campagne à lui aussi n’est pas bonne (pour le moment), dans la mesure où il change de personnage et de posture aussi souvent que Corinne Lepage change de parti politique. Entre le « petit père du peuple », le « capitaine courage dans la tempête », « le meilleur ami d’Angela et Barack » et « l’homme devenu cultivé qui regarde quand même plus belle la vie », on est perdu, et surtout, on est plus de 80% à ne pas prendre à la dernière en date. Ajoutons à cela un bilan et une côte de popularité frôlant le coupage de tête du monarque, la coupe devient trop pleine.

François Bayrou a démarré sa campagne en trombe, doublant en seulement quelques jours ses intentions de vote, pour stagner depuis et s’essouffler, écrasé par les deux géants et peinant à trouver un tournant. Son refrain est peut-être trop connu des français qui veulent quand même choisir entre droite et gauche, c’est dans leur ADN politique.

Marine Le Pen aussi mène une mauvaise campagne, après des moments où pourtant elle a réussi à grignoter sur sa gauche, promettant la lune aux ouvriers. Affaiblie par son programme économique qu’elle ne maitrise pas, et auquel personne ne croit, elle tente de droitiser son approche pour ne pas se laisser concurrencer par Nicolas Sarkozy et lance donc des polémiques stériles et inutiles pour créer le buzz et continuer d’exister. Zéro pointé.

Passons sur le cas calamiteux d’Eva Joly qui ridiculiserait presque l’écologie politique si cette femme n’était plus une victime de ce constat que la cause première. Sacrifiée sur l’autel des accords électoraux, l’ancienne juge n’avait dès lors plus aucune chance.

Reste donc Jean-Luc Mélenchon. Il y a un an, personne n’aurait parié un kopek sur l’ancien trublion du Parti Socialiste qui avait claqué la porte après le congrès de Reims. Ayant réussi le coup de force de devenir le candidat de son parti, mais aussi du parti communiste française, il mène campagne depuis juin 2011, ce qui est une période assez longue pour qu’il ait pris ses marques et se soit installé dans le paysage présidentiel. Et progressivement, il a réussi à devenir un « grand parmi les petits », talonnant François Bayrou et pouvant espérer un score à deux chiffres.

Mais c’est sur le fond également qu’il mène une bonne campagne. D’abord parce que, contrairement aux autres candidats, il fait une campagne dite « pédagogique ». Multipliant les meetings qui rencontrent semaine après semaine davantage de succès, il y explique des aspects « compliqués » de la vie politique comme le droit du travail, le MES ou divers volets de la vie économique française. Son but d’ailleurs, et il le revendique, est d’éveiller les masses pour qu’elles prennent en masse leur destin. Or, cela passe par une éducation, une certaine pédagogie pour former un esprit critique. Une démarche digne de la tradition des Lumières, qui poursuivaient le même objectif.

De plus, c’est aussi le seul candidat à avoir le cran de s’attaquer frontalement à Marine Le Pen, pas très subtilement certes, parfois trop brutalement pour être pertinent, mais il reste le seul candidat à voir en le Front National un problème pour la démocratie française, et à ne pas avoir abandonné le combat contre l’extrême-droite, ce qui est d’ailleurs très apprécié à gauche, notamment chez les militants socialistes.

De ces points de vue, la campagne du Front de Gauche est donc pour le moment la mieux réussie, surtout parce que les autres ne sont pas vraiment à la hauteur de ce que l’on attend. Si Jean-Luc Mélenchon a pu s’adonner une fois ou deux à la tentation de la « petite phrase », il échappe cependant aux polémiques stériles qui envahissent la campagne depuis des mois, pour se consacrer à un travail plus laborieux sur le terrain, et beaucoup moins visible à la télévision mais qui paie. Résultat le 22 avril dans les urnes...