Polémique sur le drapeau de la Martinique
Publié le Par Fabrice Bluszez
Une polémique renaît en Martinique, soutenue par le CRAN (Conseil représentatif des associations noires) : faut-il interdire le drapeau portant les armes de l'île, sous l'Ancien Régime ? Une plainte a été déposée par 20 personnes.
Louis-Georges Tin est connu à Paris pour ses actions en justice contre toute forme de racisme. Il soutient aussi, en Martinique, le Mouvement international pour la réparation et le Comité national pour les réparations (comprendre : les réparations pour la période de l'esclavage soit 1664-1848).
La polémique relancée porte sur le drapeau de la Martinique. Il s'agit en fait du pavillon créé par une ordonnance du 4 août 1766 du général et de l'intendant de la Martinique et Sainte-Lucie :
« Tous les propriétaires de vaisseaux, bâtiments, goëlettes et bateaux de la Martinique et de Sainte-Lucie feront pourvoir leurs bâtiments d'un pavillon bleu avec une croix qui partagera le dit pavillon en quatre; dans chaque carré bleu, et au milieu du carré, il y aura la figure d'un serpent en blanc, de façon qu'il y aura quatre serpents en blanc dans le dit pavillon, qui sera reconnu dorénavant pour celui de la Martinique et de Sainte-Lucie. »
Ce drapeau est en fait une adaptation locale du pavillon de la marine marchande du Royaume de France. Il est bleu, avec une croix blanche et porte au centre (dans une version complète) les armes de France, aux trois fleurs de lys.
On retrouvera ces trois fleurs dans chaque quart du drapeau des volontaires des régiments de la marine marchande. Plus tard, celui de la Nouvelle France ne comporte qu'une fleur par quart. Le Québec l'a gardé ainsi. Les troupes de marine placent les fleurs de lys en or dans la croix et une ancre dans chaque quart.
Sans valeur officielle
A la Révolution, tout cela disparaît. Le drapeau tricolore s'impose partout. Les vieilles armoiries appartiennent à la science héraldique, l'art des blasons. Celles de la Martinique sont donc ces quatre quarts bleu de France, la croix blanche et les quatre serpents, des trigonocéphales typiques de l'île.
On les retrouvera aussi sur les blasons des uniformes de gendarmerie, qui est organisée en régions militaires recoupant les régions administratives et qui, très tôt, a fait élaborer pour chaque région des blasons regroupant les blasons des départements locaux.
Officiellement, ces armoiries n'ont aucune valeur, sinon historique. Souvent les collectivités territoriales ont préféré dessiner des logos, avec plus ou moins de bonheur... La réforme des régions a fait cependant renaître les drapeaux occitans, bretons, normands... Mais en Martinique, le Département, la Région, la Collectivité ont fait d'autres choix...
Plainte contre Emmanuel Macron, Gérard Collomb et Annick Girardin
La plainte déposée vendredi au bureau du procureur de Fort-de-France vise le drapeau aux quatre serpents. Le quotidien France-Antilles rapporte l'affaire ainsi :
« Ce vendredi, à 14 heures, membres et sympathisants se sont réunis devant le palais de justice... Une vingtaine de plaintes a été déposée au secrétariat du procureur de la République. De leur côté, le MIR et le CNR ont envoyé leur plainte au procureur de la République, respectivement les 23 novembre et 2 décembre derniers. Le MIR et le CNR encouragent ceux qui le souhaitent, à envoyer leurs plaintes par lettre recommandée avec accusé de réception. Il est toujours possible de déposer sa plainte, une lettre type est disponible sur leurs pages facebook. »
Le Mouvement international pour les réparations (Martinique) a sa page Facebook. Il existe aussi en Guadeloupe. La plainte a été déposée contre le président de la République, le ministre de l'Intérieur et la ministre de l'Outre-Mer pour : "apologie de crime contre l'humanité, injure raciste, non-respect de la Constitution, incitation à la haine raciale, port d'un emblême d'une organisation criminelle contre l'humanité" et "troubles contre l'ordre public".
Une pétition a été lancé par le CNR Martinique sur Avaaz.org pour demander le retrait du drapeau aux quatre serpents, y compris en émoticone. Elle approche, ce 31 décembre 2017, des 400 signatures.