Présidentielle : l’Assemblée nationale a adopté le MES.
Publié le Par Jennifer Declémy
Les députés ont adopté hier le fameux MES, mais ce dernier a permis de révéler au grand jour de profondes divisions au sein de la gauche.
C’était LE débat du jour à l’Assemblée nationale, le jour où les députés examinaient le fameux Mécanisme Européen de Stabilité financière qui institue un fonds de secours pour les pays adhérant à ce fonds mais sous réserve qu’ils adoptent tous une règle d’or. Si la majorité suit naturellement son chef qui fut en partie à l’origine de ce mécanisme indissociable du nouveau traité européen, la gauche elle était divisée entre les farouches opposants, Front de Gauche, communistes et écologistes, et les socialistes, qui sont pour, en principe, mais sont contre dans la mesure où François Hollande a annoncé que, s’il était élu, il renégocierait le traité pour y ajouter un volet croissance, et que donc, il y aurait incohérence totale entre la ratification d’un mécanisme qui lierait de facto au traité critiqué et fustigé. Un cheminement intellectuel particulièrement pas facile à suivre.
In fine, la situation est en fait plus claire qu’elle ne le parait car le débat d’hier met en exergue une réalité politique très simple : la fracture de 2005 n’a jamais été réparée, et aujourd’hui, à l’aune de la présidentielle, elle réapparait dans le débat public pour s’y imposer, et prendre en intensité. Et naturellement, elle divise la gauche.
Au sein même du Parti Socialiste, la décision de s’abstenir sur le texte a été difficile, entre les tenants d’un vote positif comme le député européen Harlem Désir, les partisans d’une abstention comme Jean-Marc Ayrault et les partisans d’un vote négatif, qui ont même enfreint les consignes du groupe hier en votant non comme Henri Emmanuelli ou Marie-Noëlle Lienemann. Cette fracture d’aujourd’hui est exactement la même que celle de 2005 au sein du Parti Socialiste.
Le vote même des socialistes hier à l’Assemblée était attendue par tout le monde, et a été critiqué par tous : Jean-Luc Mélenchon, qui avait signé une tribune le jour même dans Libération pour « adjurer » ses anciens camarades de voter non et qui n’est donc pas satisfait du vote d’abstention qui consiste en fait à « préparer une capitulation. Surtout quand on prétend vouloir gouverner le pays ». Pourtant, selon le député Claude Bartolone « c’est une abstention constructive », ce qui ne convainc personne, tandis que Razzy Hammadi, plus cohérent, argue que « s’abstenir, c’est une manière de ne pas cautionner le traité et, en même temps, cela permet que l’argent soit versé à la Grèce ».
Et la droite naturellement s’était invitée dans le débat, ravi de mettre son adversaire face à ses contradictions. C’est le Premier Ministre en personne qui, lors des questions au gouvernement, a demandé aux socialistes de voter avec eux le vote de ce mécanisme indispensable pour la survie de l’Europe.
Le débat du MES permet de mettre en lumière un réel débat qui traverse la gauche française face à l’Europe, à l’heure où pourtant le candidat socialiste ne doit surtout pas montrer la moindre faiblesse sur ce sujet. Cela peut réellement lui porter préjudice face à un président sortant qui fut très actif sur la scène européenne. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant si Angela Merkel soutient Nicolas Sarkozy : ce n’est pas tant le socialisme qu’elle abhorre, mais plutôt une crainte d’une régression européenne si la gauche française arrivait au pouvoir. Il serait temps que le Parti Socialiste soigne ses divisions de 2005, qui n’ont décidément pas été résorbées par le départ de Jean-Luc Mélenchon.
Pour aller plus loin : Jean-Luc Mélenchon s'insurge contre le MES.