La liberté de la presse souffre pendant la présidentielle
Publié le Par Jennifer Declémy
L'Europe avait déjà pointé du doigt le mauvais état de la liberté de la presse en France. En cette période cruciale, plusieurs éléments tendent à prouver que des deux côtés, ce droit fondamental est bafoué sur certains égards.
Jamais autant de médias et de sites d'information n'auront existé et n'auront été capables de retransmettre les informations concernant une élection présidentielle mais aujourd'hui, deux déclarations, pas vraiment relayés par la presse, montrent que certains candidats ne sont pas prêts à admettre une totale liberté de la presse.
Marine Le Pen tout d'abord ce matin sur France Info. Interrogée par la journaliste sur son refus d'admettre les journalistes de Mediapart à ses meetings dorénavant, la présidente du Front National s'indigne et explique que, étant donné que Mediapart ne veut pas l'interviewer, et bien elle leur rend la pareille et ne leur permet pas de la suivre durant ses meetings.
Deuxième séquence, c'est cet après-midi à Annecy, où le candidat Sarkozy, interrogé par des journalistes de Mediapart sur Eric Woerth, mis deux fois en examen la semaine dernière, leur répond la chose suivante : "Ecoutez...qu'est-ce que vous me parlez de cela...je suis là...à Annecy, j'ai pas envie de parler de ça".
Deux dans la même journée c'est un peu fort de café. Dans le premier cas tout d'abord, Marine Le Pen nie avec force la liberté de presse qui est un droit fondamental de TOUS les journalistes. Chaque journal peut interviewer qui il veut, et ce n'est pas parce que la leader d'extrême droite est présente à l'élection présidentielle qu'ils sont obligés de l'inviter dans leurs locaux. Ne pas l'inviter, c'est leur choix, et ils ne sont pas les seuls : Nicolas Demorant pour Libération hésite à l'inviter, Michel Drucker sur France 2 ne veut toujours pas la recevoir dans son émission culte du dimanche et Laurent Ruquier jusqu'à récemment prétendait ne pas vouloir l'inviter sur son plateau.
Bien sûr, le fait que Mediapart lui soit farouchement opposée et dresse d'elle et de son programme des portraits sans concessions, contrairement à la quasi-totalité des autres journalistes, n'a rien à voir avec la décision de Marine Le Pen, c'est évident. Cependant, il y a une marge entre être contre un journal et lui interdire tout accès à l'information. C'est une négation de la liberté de presse, purement et simplement.
Deuxième cas de figure à présent, moins grave certes mais qui interpelle. Nicolas Sarkozy est donc candidat, et il nous déclarait hier vouloir redescendre de son piédestal présidentiel. Apparemment ce n'est pas une descente totale qu'il effectue. Quand on l'interroge sur les questions qui dérangent, le chef de l'état en campagne présidentielle fait la sourde oreille et balaie les questions. Et effectivement, un ancien trésorier, actuellement élu et qui jouera un rôle officiel dans sa campagne présidentielle, ça peut faire tâche quand la personne en question a été mise en examen pour une affaire qui pourrait remonter jusqu'à un financement illégal de votre précédente campagne.
On admettra que bien évidemment Mediapart est farouchement opposé à ces deux candidats, et que les relations sont donc conflictuelles. Soit, mais cela n'explique rien car tout conflit ne doit pas entraver le droit à l'information des français qui consultent ce média. De même, le Figaro qui se refuse à interview tout dirigeant socialiste depuis le mois d'août dernier, ça fait long, et c'est cric-crac niveau pluralisme dans l'information.
Avec tous ces éléments, on comprend finalement pourquoi la France est aussi mal classée niveau liberté de la presse.