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Les soupçons et les sanctions pénales qui pèsent sur Nicolas Sarkozy

Publié le  Par Antoine Sauvêtre

Crédit image © UMP Photos - flickr


Après près de 18h de garde à vue, Nicolas Sarkozy a été mis en examen pour « corruption active », « trafic d’influence » et « recel de violation du secret de l'instruction ». Pour quelles raisons ? Et que risque désormais l’ancien chef d’Etat ?

Si les deux juges d’instruction, Patricia Simon et Claire Thépaut, ont décidé de mettre en examen Nicolas Sarkozy, c’est qu’elles considèrent qu’il existe suffisamment d’ « indices graves et concordants » pouvant laisser croire que l’ancien président a commis une infraction. Cette mise en examen indique uniquement qu’il existe des soupçons légitimes et ne signifie aucunement que Nicolas Sarkozy s’est rendu coupable des actes dont il est suspecté.
 

Quoi qu’il en soit, les soupçons pesant sur l’ancien chef d’Etat sont graves : « corruption active », « trafic d’influence » et « recel de violation du secret de l'instruction ». Les deux autres hommes mis en examen dans cette affaire, l’avocat de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog, et un haut magistrat de la Cour de cassation, Gilbert Azibert, sont, eux, suspectés de « trafic d’influence » et de « violation du secret de l’instruction ».

Une affaire, des affaires

Pour bien comprendre pourquoi les magistrates ont des soupçons sur les trois hommes, il est nécessaire de revenir sur le début de l’affaire… ou plutôt, des affaires. Car c’est une enquête sur un possible financement libyen de la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007, qui est à l’origine de tout. Dans le cadre de cette enquête, Nicolas Sarkozy et son avocat Me Thierry Herzog sont placés sur écoutes téléphoniques. Or, ces interceptions téléphoniques captées en janvier et février 2014, vont révéler aux enquêteurs de toutes autres informations.
 

Ensemble, ils auraient monté un réseau d’informateurs – composé de Gilbert Azibert et Patrick Assoust – susceptible de les renseigner dans les procédures judiciaires pouvant menacer l’ancien président de la République. Dans le dossier Bettencourt, pour lequel Nicolas Sarokzy a depuis été mis hors de cause, les agendas de l’ancien président avaient été saisis. Mais la Justice souhaitait les conserver pour d’autres affaires dans lesquelles le nom de Nicolas Sarkozy est cité.

« Recel de violation du secret de l’instruction »

Les interceptions téléphoniques du début de l’année 2014 montrent que Nicolas Sarkozy et son avocat « semblaient très renseignés sur l’avancée des travaux de la Cour de cassation », indique le journal Le Monde. Des travaux protégés par le secret professionnel. De plus, l’ancien président et Thierry Herzog se savaient placés sous écoute. Pour échanger en toute discrétion, Nicolas Sarkozy a donc acheté un nouveau téléphone portable, sous un nom d’emprunt. Avec ce téléphone, lui et son avocat auraient organisé des discussions à avoir sur leurs véritables téléphones pour brouiller les pistes.
 

D’après l’article 226-13 du code pénal, « la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

« Trafic d’influence »

Toujours en s’appuyant sur les écoutes téléphoniques, les juges d’instruction suspectent Gilbert Azibert, 1er avocat général près de la Cour de cassation, et son collègue Patrick Sassoust, avocat général à la chambre criminelle de la haute juridiction, d’avoir transmis à Nicolas Sarkozy des informations confidentielles, via son avocat Me Thierry Herzog. En échange, M. Azibert aurait souhaité obtenir de l’ancien président un appui pour être nommé à un poste qu’il convoitait à Monaco.
 

Dans les écoutes téléphoniques révélées par Mediapart, l’ancien président de la République se dit prêt à aider M. Azibert car il « sait parfaitement » tout ce qu’il fait pour lui. D’où le chef d’accusation de « trafic d’influence » qui est le fait, selon l’article 433-2 du code pénal « de solliciter ou d'agréer, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour lui-même ou pour autrui, pour abuser ou avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable ». Cette accusation est passible de 5 ans d’emprisonnement et 500 000 euros d’amende.

« Corruption active »

La corruption active est en quelque sorte « le stade supérieur au trafic d’influence », indique le journaliste Simon Piel sur le réseau social Twitter. Ce chef d’accusation, qui ne concerne que Nicolas Sarkozy, et non les deux autres hommes mis en examen, s’explique par le fait que l’ancien chef d’Etat apparait comme le donneur d’ordre. Toutes les informations collectées par les deux magistrats étaient données à l’avocat de Nicolas Sarkozy, qui lui-même recevait des directives de l’ancien président pour obtenir de nouvelles informations auprès des magistrats.
 

Pour cela, Nicols Sarkozy risque, d’après l’article 433-1 du code pénal, une peine pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison.

Inéligibilité en cas de condamnation ?

Une autre menace pèse sur l’ancien président de la République, dont le retour en politique était de plus en plus réclamé par certains membres de l’UMP après l’affaire Bygmalion. Celle d’une éventuelle inéligibilité en cas de condamnation. Selon l’article 432-17 du code pénal, Nicolas Sarkozy, qui rappelons le, est présumé innocent, pourrait subir une peine complémentaire. Parmi celles-ci, il y a notamment la déchéance des droits civils et civiques, l’interdiction d’exercer une fonction publique, ou l’exclusion des listes électorales pour une durée limitée. Si les simples suspicions pesant sur Nicolas Sarkozy entachent déjà un éventuel retour en politique, une condamnation pourrait, elle, le rendre impossible.