Présidentielle : comparer François Hollande à Balladur et Jospin n'a aucun sens
Publié le Par Jennifer Declémy
Edito : le camp présidentiel tente de se rassurer en niant les sondages et en invoquant une règle ancienne de toute élection présidentielle selon laquelle les favoris sont toujours battus. Pourquoi ils ont tort....
Le slogan de l’UMP en ce moment semble être le suivant : comparer le candidat socialiste, François Hollande à Edouard Balladur en 1995 ou Lionel Jospin en 2001, tous les deux favoris des sondages et chouchous des médias ces années-là, et qui avaient échoués dès le premier tour de l’élection présidentielle.
Le raisonnement de la majorité est le suivant : depuis sa désignation à l’issue de la primaire socialiste, François Hollande caracole en tête des sondages d’une manière qui frise l’insolence. Mais, parce qu’il y a un MAIS, cela ne veut absolument rien dire dans la mesure où les favoris des sondages ont toujours été battus sous la Cinquième République. Ce serait là une règle mathématique de notre vie politique, celle qui veut que ce sont toujours les outsiders qui remportent la victoire finale.
Soit. L’UMP essaie donc de se rassurer grâce à cet argument imparable, alors que plusieurs éléments prouvent que dans la campagne électorale de 2012 n’obéit absolument pas à cette logique, et ce, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, cette même règle soit disant intangible ne s’est pas appliquée en 2007. A partir du 14 janvier, Nicolas Sarkozy est passé en tête dans les sondages et il n’a plus jamais quitté cette place. Qui plus est, il disposait du soutien de certains grands groupes médiatiques et il était depuis plusieurs années le favori pour remporter cette élection.
Deuxième élément, et sans doute le plus important : François Hollande n’est NI Edouard Balladur, NI Lionel Jospin. Ces deux derniers étaient des Premiers Ministres en exercice, au moment de l’élection, qui devaient donc assumer un bilan gouvernemental, un exercice du pouvoir où beaucoup de reproches pouvaient leur être faits. François Hollande lui est un homme libre qui se présente « nu » aux français. Il n’a rien à se reprocher, tout à prouver.
En outre, Edouard Balladur et Lionel Jospin, tous les deux, parce qu’ils étaient chouchoutés par le microcosme parisien, et parce qu’on disait déjà d’eux qu’ils seraient élus Président de la République sans avoir besoin de se battre, n’ont pas réellement mené campagne. Ils se sont laissés porter par des sondages fumeux, persuadés que leur adversaire (en l’occurrence Jacques Chirac pour tous les deux) était trop faible, trop « nul », pour les battre.
François Hollande lui mène campagne depuis 2 ans déjà, et quoi qu’on puisse penser de lui, il mène campagne avec force et pugnacité. Multipliant les initiatives (bonnes ou mauvaises), il laboure le terrain etc. Bref, il a réfléchit sa candidature et sa campagne et il est totalement impliqué dedans, conscient que le trône élyséen ne lui tombera pas tout cuit dans les mains.
Troisième différence : si Jacques Chirac n’était pas réellement apprécié au début de ses deux campagnes présidentielles, il n’existait pour autant pas « d’anti-chiraquisme » comme aujourd’hui il existe un antisarkozysme primaire, presque viscéral dans notre société. Jamais un Président sous la Cinquième République n’a autant été vilipendé, moqué et de manière générale détesté, et c’est sûrement la plus grande force du candidat socialiste.
Pour toutes ces raisons, parier sur un effondrement sondagier de François Hollande comme ce fut le cas d’Edouard Balladur et Lionel Jospin est une grave erreur pour la droite. Ce théorème est inapplicable en 2012, et l’UMP va devoir se réconforter d’une autre manière, par le biais d’autres arguments, si c’est encore possible.