L'état d'urgence contre un photographe et des militants d'extrême gauche
Publié le Par Fabrice Bluszez
L'état d'urgence a servi de prétexte à une série d'arrêtés personnels vivant à interdire à des militants d'extrême gauche et à un photographe professionnel d'être dans les manifestations.
NnoMan, ce n'est pas son vrai nom, mais il a préféré séparer sa vie personnelle et sa vie professionnelle, a-t-il expliqué, en substance, sur BFMTV, lundi soir. Ce photographe de presse parisien, dont on verra les clichés sur son site, et qui travaille avec le collectif Oeil, avait suivi les manifestations anti-loi El Khomri et le mouvement Nuit Debout depuis le début.
Il a reçu au domicile de ses parents, samedi 14 mai, une interdiction, par le préfet de police de Paris, de se trouver dans certains secteurs de Paris :
« Le mardi 17 mai, entre 11 heures et 20 heures dans les 6e, 7e, 14e et 15e arrondissements de Paris et de 18 heures jusqu'à 7 heures le lendemain dans le périmètre autour de la place de la République délimité par les voies suivantes...»
La sanction serait d'un an de prison et 15.000 € d'amende. Le texte avance que NnoMan (sous son vrai nom, Cadoret, semble-t-il) « a été remarqué à de nombreuses reprises lors des manifestations » et :
« ...Qu'il y a dès lors tout lieu de penser que la présence de M. … aux rassemblements organisés contre le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs vise à participer à des actions violentes...»
Le reporter a pris un avocat, Hosni Maati. Il entend bien montrer que cette décision est illégale. De son côté, devant le tollé, la préfecture de police a annoncé une communication ce mardi 17 mai au matin puis, vers 22 heures, la levée de cet arrêté.
Une dizaine de militants du collectif Action Antifasciste Paris-Banlieue (les antifas, pour ceux qui se souviennent de l'affaire Clément Méric, qui en faisait partie et a été tué lors d'une bagarre le 6 juin 2013) et du Mouvement inter-luttes indépendant (Mili) ont reçu ce genre de courrier nominatif.
Ils sont eux aussi interdits de séjour « de 11 heures à 20 heures dans les 6e, 7e, 14e et 15e arrondissements de Paris et de 18 heures jusqu'à 7 heures le lendemain dans le périmètre autour de la place de la République ».
Michel Cadot, préfet de police, utilise l'état d'urgence pour valider la méthode. L'article 5 permet « d’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des pouvoirs publics ». Mais aucun de ces militants n'a été interpellé, selon le quotidien Le Monde qui a interrogé un proche de ces mouvements.