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La maîtresse italienne, de Jean-Marie Rouart

Publié le  Par Pascal Hébert

Crédit image © Francesca Mantonvani


Après ses "Révoltes", son dernier livre narrant son parcours littéraire et journalistique, Jean-Marie Rouart renoue avec le roman historique. Avec "La maîtresse italienne", l’académicien nous fait traverser le temps pour atterrir en 1814 sur l’île d’Elbe accueillant un hôte prestigieux. Lors de son premier exil, Napoléon n’a mis qu’un pied à terre. Il n’a pas rendu complètement les armes. Loin de la terre de France, ‘‘l’absent’’ attend que le vent tourne en sa faveur. Sur cette île, le proscrit reconstitue un mini-empire de sous-préfecture sous la garde de quelques officiers de la couronne britannique, chargés d’empêcher l’illustre personnage de prendre la poudre d’escampette.

Dans ce théâtre d’opérette, on scrute les faits et gestes de celui qui a régné sur tout un continent. Ne laissant pas indifférent ceux qui l’approchent, l’empereur mesure, s’il en était encore besoin, son charisme et la curiosité qu’il suscite. Bien au-delà de la légende qui le précède, Napoléon éclabousse ses visiteurs de son intelligence supérieure. Celui, que les grognards humiliés par la monarchie regrettent un peu partout en France, peut compter sur des informateurs. Il est renseigné sur tout ce qui se dit et se fait dans les grandes capitales d’Europe. Il en sait beaucoup sur ses ennemis et ceux qui l’ont trahi. Tout en gérant l’île d’Elbe, Napoléon reste muet sur ses intentions.


Dans ce contexte particulier, les espions jouent un rôle primordial pour agir sur le destin. Et notamment celui de Napoléon. Mais le destin du banni se joue au congrès de Vienne où certains veulent l’éloigner de son rocher au large de la Toscane. Le congrès de Vienne est le rendez-vous des négociations mais aussi des soirées festives et de débauches. C’est dans ce contexte que Jean-Marie Rouart émet l’hypothèse que le colonel Neil Campbell, en charge de déjouer toute évasion de Napoléon, aurait été séduit par la ravissante comtesse Miniaci afin de l’éloigner de l’île d’Elbe le jour du départ de Napoléon pour la France. Sous le charme de la belle intrigante, le colonel anglais aurait été dupé par cette possible espionne agissant à la solde des soutiens de l’empereur.

Pour Jean-Marie Rouart : « Seule certitude, sans la comtesse de Miniaci la formidable épopée des Cent-Jours, l’invasion d’un pays par un seul homme, n’eût pas été possible. » On pourrait ajouter que sans le comportement de Napoléon faisant croire à Campbell qu’il était résigné à vivre sur son île, l’histoire aurait pu être différente. Baissant la garde, le colonel a cherché de son côté à s’évader en participant à des fêtes et à s’amouracher des femmes de la haute société dont la fameuse comtesse. Il est probable que l’ennui, l’oisiveté et le désir de conquête des belles italiennes ont contribué à éloigner le colonel anglais ainsi que son bateau amiral de l’île d’Elbe la nuit du départ de Napoléon pour Golfe-Juan.

Coïncidence ou pas, avec "La maîtresse italienne", Jean-Marie Rouart nous entraîne dans une période de l’histoire de France peu mise en lumière et qu’il sublime grâce à son talent de conteur.


Pascal Hébert

"La maîtresse italienne", de Jean-Marie Rouart.
Éditions Gallimard. 277 pages. 20 €.